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17 février 2012 5 17 /02 /février /2012 11:02

Cette semaine offre aux Occidentaux une source de satisfaction et un motif d'inquiétude au Proche-Orient.

 

syrie.pngHier l'Assemblée générale des Nations-Unies a adopté par 142 voix pour (et non 137 comme initialement annoncé soit 9 de plus que lors d'un vote similaire en décembre dernier), et 12 abstentions (au lieu de 17 annoncées initialement) une résolution condamnant la répression menée par le régime de damas. La Russie, la Chine, le Venezuela (actuellement menacé de sanctions pour avoir livré du diesel à Damas), l'Equateur, le Cambodge, la Bolivie, le Nicaragua, Cuba, l'Iran, le Zimbabwe, la Corée du Nord et la Syrie. La Chine a fait savoir qu'elle condamnait la répression et appuyait les aspirations du peuple syrien mais qu'elle souhaitait une évolution dans le respect de la loi et expliquait son vote par le refus d'une politique de "changement de régime" (regime change) dictée de l'extérieur.  La Russie a dénoncé un document "non-équilibré". L'Algérie, l'Arménie, l'Angola, le Liban, la Tanzanie, le Surinam, les Fidji, le Vietnam, l'Ouganda, le Cameroun, le Népal se sont abstenus (d'après ArabSaga et sous réserve des dernières révisions de vote). Certains pays qui ont voté pour la résolution ont fait savoir que ce vote ne devait pas servir de base à une action militaire - telle fut par exemple la position de la Grenade. L'Inde, qui s'était attirée des critiques en s'abstenant sur la Syrie au comité des droits de l'homme de l'ONU en novembre, a voté pour la résolution cette fois-ci (il n'y a donc plus d'unité des BRICS sur ce dossier), de même que l'Argentine, l'Afrique du Sud et le Brésil qui pourtant défendent souvent le non alignement. Le représentant indien comme celui de la Grenade s'est cependant déclaré hostile à une ingérence extérieure. Le vote "pour " de certains pays  attire l'attention : la Serbie (pourtant en délicatesse avec les Occidentaux sur le Kosovo), l'Azerbaïdjan (allié important des Occidentaux en cas de guerre contre l'iran), le Myanmar (qui scelle ainsi sa nouvelle alliance avec les USA), le Kirghizstan (pays peu démocratique mais important pour l'OTAN en Asie centrale), le Soudan, le Sri Lanka (lui aussi exposé à des ingérences sur son processus de réconciliation nationale, et qui avait été initialement compté comme abstentionniste) et même l'Irak (réputé proche de Téhéran et qui soutenait la Syrie l'an dernier).

 

Parallèlement le Parlement européen votait une résolution demandant le gel des relations des 27 avec Damas et l'arrêt des livraisons militaires russes à Bachar El-Assad, mais résistait aux options maximalistes comme celle de l'eurodéputée socialiste belge Véronique de Keyser qui demandait l'instauration d'une zone d'exclusion aérienne comme en Libye (dispositif militaire qui avait permis le soutien des bombardiers de l'OTAN aux milices de Misrata et Benghazi).

 

La France a annoncé son intention de créer un fonds d'urgence humanitaire pour la Syrie doté d'un montant d'un million d'euros, après une rencontre avec des ONG impliquées dans ce pays et prépare avec la Ligue arabe dirigée par le Qatar un projet de résolution au conseil de sécurité de l'ONU impliquant la création de corridors humanitaires. La France a aussi favorisé la mise en place d'un groupe "d'amis de la Syrie" qui se réunira en Tunisie le 24 février (la Syrie a expulsé récemment l'ambassadeur de Tunisie) et se rapproche à nouveau du Royaume-Uni (après quelques semaines de tension), un rapprochement qui pourrait avoir des prolongerments militaires opérationnels en cas d'intervention directe.

 

Le gouvernement syrien qui continue la répression des milices armées à Homs, Hama, Deraa, a procédé à l'arrestation d'un journaliste et d'une blogueuse hier. Il a par ailleurs annoncé la tenue d'un référendum le 26 février sur une réforme constitutionnelle qui abrogera le rôle dirigeant du parti Baas dans l'Etat et dans la société et limitera le mandat présidentiel à deux septennats. Le Comité de coordination pour le changement national et démocratique (opposition de l'intérieur) a appelé au boycott du référendum.

 

flag_egypt.pngSi les Occidentaux ont remporté un succès diplomatique à l'ONU, leur situation se complique en Egypte. Comme nous l'avions indiqué début janvier, fin décembre 17 locaux d'ONG égyptiennes et internationales de défense des droits et de promotion de la démocratie avaient été perquisitionnés au Caire.  44 personnes, dont 19 Américains (dont le fils du ministre des transports américain) et d'autres étrangers, accusées de financement illégal d'organisations non gouvernementales ont été arrêtées. Les Etats-Unis ont haussé le ton en menaçant l'Egypte de couper l'aide militaire si ces personnes n'étaient pas relâchées, mais contre toute attente, les Frères musulmans égyptiens, avec lesquels le démocrate John Kerry avait pourtant pris contact en décembre, font bloc aujourd'hui avec le conseil militaire de transition sur ce dossier. Hier 16 février, Essam El-Erian, nouveau président de la commission des affaires étrangères de la Chambre du Peuple et vice-président du Parti de la liberté et de la justice (Frères musulmans), a déclaré à une agence de presse occidentale que l'aide militaire américaine faisait partie des accords de paix de Camp David signés en 1979 avec Israël.

 

Les membres du Congrès des Etats-Unis de leur côté ont multiplié les menaces ces derniers jours, le représentant démocrate Gary Ackerman disant même que Washington et le Caire "étaient en train d'approcher du précipice au delà duquel nos relations bilatérales pourraient subir un dommage définitif". "Si les gens ici [aux Etats-Unis] concluent que l'Egypte n'est pas sur le chemin de la démocratie, mais qu'elle est au contraire en voie de devenir un autre Iran, nos relations bilatérales n'y survivront pas, a-t-il ajouté. Nous n'en sommes pas encore à ce point, mais nous nous en rapprochons chaque jour".

 

Selon un récent sondage 70 % des Egyptiens ne veulent pas de l'aide économique et militaire américaine. Mercredi un important prédicateur salafiste égyptien a demandé que l'aide américaine soit remplacée par des dons des citoyens. Le même jour Rashad Bayoumi, autre haut responsable des Frères musulmans, a déclaré que l'aide américaine étaot une "chaine qui limite la liberté " de l'Egypte, la qualifiant d' "aide humiliante" et il a critiqué l'ambassadrice américaine Anne Patterson rappelant qu'elle avait eu un passé douteux ("questionable") au Pakistan et l'accusant d'avoir été nommée en Egypte au mois d'août dernier pour y développer les mêmes méthodes. Il reprenait les accusations du prédicateur Mazhar Shaeen formulées en septembre 2011 selon lesquelles Mme Patterson aurait favorisé la "sédition" au Pakistan (en 2010 Wikileaks avait révélé les intrigues de l'ambassadrice américaine à Islamabad).

 

L'Egypte et le Pakistan qui sont avec l'Indonésie parmi les trois plus grandes puissances musulmanes alliées des Etats-Unis sont en ce moment en froid avec ce pays. En Egypte le débat sur l'aide américaine fait sauter un tabou. Ses conséquences sont désormais imprévisibles.

 

 


 

 

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