La présidente argentine Kristina Fernandez-Kirchner l'avait déclaré à propos de l'exploitation pétrolière britannique aux Malouines en décembre 2011 : les pays qui ont la force iront chercher les ressources naturelles "où qu'elles soient et comme ils veulent" et avait souligné à cette occasion la nécessité pour les pays du Sud de préparer leur défense. Lundi dernier elle a annoncé sa décision d'exproprier YPF filiale de la compagnie pétrolière espagnole Repsol (une mesure anti-libérale qui s'ajoute au contrôel des changes instauré en novembre 2011). Mme Kirchner a expliqué qu'YPF sous-exploitait les ressources argentine alors que ce pays serait le troisième au monde pour ses réserves de gaz, condamnant, pour la première fois depuis 17 ans l'Argentine à devenir un importateur d'hydrocarbures ce qui pèse très lourdement sur la balance commercial du pays alors que les exportations agricoles diminuent, et sur le fonctionnement de l'industrie qui dépend beaucoup du gaz.
La privatisation d'YPF avait été conduite dans les années 1990 par le parti peroniste auquel Mme Kirchner appartient. déjà en 2011 des gouvernement provinciaux (qui devraient détenir un quart des actions d'YPF après la nationalisation) avaient déjà commencé à annuler des concessions de Repsol-YPF du fait de la baisse de la production. Elle représente un tiers de l'exploitation pétrolière nationale.
Les réactions des Etats et technostructures occidentales ne se sont pas faites attendre.
Les Etats-Unis se sont dits mercredi "très préoccupés", la chef de la diplomatie de l'UE, Catherine Ashton, a qualifié la décision du gouvernement argentin de "très mauvais signal", tandis que le président du conseil espagnol de droite Mariano Rajoy (cette semaine en voyage chez les alliés latino-américains de Washington : le Mexique et la Colombie) a exigé des sanctions financières, mais son ministre des affaires étranges José Manuel García-Margallo a dû fare part de son "profond malaise" devant le manque d'enthousiasme d'Hillary Clinton sur ce dossier, tandis que l'Union européenne elle aussi a refusé de suivre Madrid sur la voie des représailles commerciales.
Le 30 mars,l'Union européenne et douze pays aux côtés des Etats-Unis, avaient exprimé devant l'Organisation mondiale du commerce (OMC) "leurs inquiétudes permanentes et croissantes sur la nature des mesures restrictives pour le commerce prises par l'Argentine".Les agences occidentales rappellent que sur 46 litiges en attente de règlement au Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements de la Banque mondiale, 25 concernent l'Argentine, le pays qui en a le plus, devant le Venezuela (20).
Malgré les menaces, cette semaine l'opinion publique argentine fait bloc derrière sa présidente. Au Sénat, une large part de l'opposition s'est ralliée au vote de l'ordonnance qui permettra à la présidente de nationaliser YPF.
En Amérique latine, le président du Venezuela, Hugo Chavez, qui lui même avait nationalisé une filiale d'Exxon dans son pays, a félicité par téléphone Mme Kirchner. Le président bolivien Evo Morales qui a aussi nationalisé ses hydrocarbures a soutenu l'initiative de l'Argentine. Pas de réaction de la présidente brésilienne Dilma Rousseff pour l'heure, mais son ministre des Mines et de l'Energie, Edison Lobao, a rappelé devant le Sénat de son pays que "chaque pays a sa souveraineté et le droit de prendre ses decisions".