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31 mai 2011 2 31 /05 /mai /2011 12:19

syrie.pngDans le prolongement du Printemps arabe de Tunisie, d'Egypte et du Yémen, la Syrie connaît depuis deux mois et demi une vague de contestation grandissante malgré la répression armée organisée par le régime de Bachar el-Assad.

 

Tout a commencé dans la ville de sunnite Deraa dans le sud du pays le 15 mars où quelques enfants d’une dizaine d’années qui avaient inscrit des slogans hostiles au gouvernement sur les murs de la ville ont été arrêtés. Des parents qui ont réclamé leur libération ont été arrêtés et humiliés. Le 18 mars une centaine de protestataires s'est assemblée et a incendié le palais de justice de la ville. La police a tiré sur la foule faisant un nombre indéterminé de  morts. Les manifestations et la répression se sont poursuivies, sans images fiables, la presse sur place étant interdite. Puis le mouvement s'est étendu.

 

Le 15 avril , jour de prière des militants des droits de l'homme ont signalé des manifestations à Damas, à Deir al-Zor (est), à Banias (ouest), à Lattaquié (nord-ouest), à Homs (ouest) et à Deraa.

 

Au lendemain de la promesse du président Bachar al Assad de lever l'état d'urgence, le 16 avril, des rassemblements appelant à la démocratisation du régime se sont poursuivis à Soueida. Le même jour à Alep, deuxième ville du pays située dans le nord-ouest, plusieurs centaines de personnes auraient scandé "Le peuple veut la liberté" sur la tombe du leader indépendantiste Ibrahim Hananou, selon un militant des droits de l'homme présent sur les lieux.

 

A Damas et dans d'autres villes des partisans du gouvernement eux manifestaient en soutien au régime le 17 avril en l'honneur de l'anniversaire de l'indépendance du pays.

 

Le 30 avril puis le 8 mai, l'armée syrienne entrait à Tafas dans le sud, la police étant apparemment débordée par l'insurrection. Elle menait aussi des opérations le 7 mai à Banias. L'agitation se poursuivait aussi à Homs, Hama et Qamishli.

 

A nouveau le vendredi 20 mai les forces de sécurité auraient tiré sur la foule à Homs (centre), à Maaret al-Naamane (nord-ouest), à Deraa, principal foyer de la contestation, à Daraya, et à Lattaquié. Dans la même semaine l'armée aurait bombardé Tall Kalakh à la frontière du Liban selon l'Agence Chine nouvelle.

 

Le 18 mai les Etats Unis et le lundi 23 mai les ministres européens des Affaires étrangères ont décidé d'interdire de visa et de geler les avoirs du président syrien Bachar el-Assad, en raison de la répression du mouvement de contestation. Le 25 mai le Royaume Uni, la France, l'Allemagne et le Portugal  ont introduit un projet de résolution au conseil de sécurité de l'ONU pour condamner la violence, malgré le risque de véto de la Russie qui entretient une forte coopération militaire avec la Syrie.

 

Fin mars le président syrien a dénoncé l'existence d'un complot contre son régime.

 

La thèse d'une orchestration de la révolution syrienne par des puissances étrangères n'est pour l'instant pas vraiment étayée, mais les ingérences pour l'orienter et la récupérer ne sont pas absentes. Dès le jeudi 7 avril lors d'une soirée à l'United States Institute of Peace le président israélien Simon Péres avait appelé la "communauté internationale" à soutenir la "transition" politique en Syrie la décrivant comme la "meilleure chance" pour l'avenir de son pays.Deux semaines plus tôt Elliot Abrams, ancien conseiller de George W. Bush, dans le Washington Post appelait les Etats-Unis à faire de même.

 

Reste à faire la part de l'information et de la propagande dans ce domaine. 

 

Ainsi des rumeurs difficilement vérifiables existent sur la formation de bandes armées. Vers mi-avril, selon l'agence officielle Sana, les douanes syriennes auraient saisi des armes et des munitions cachées dans un camion en provenance d'Irak, au point de passage al-Tanaf, à la frontière syro-irakienne. Des armes qui devaient être introduites clandestinement en Syrie, auraient été également saisies aux frontières avec la Turquie et le Liban. Les médias syriens font état de snipers qui auraient dès le début entretenu le désordre à Déraa et à Banias malgré les efforts d'apaisement du gouvernement. Mais les informations sont difficiles à vérifier. Sur Internet circule le témoignage (diffusé dans certains milieux de gauche) d'une soi-disant religieuse "Mère Agnès-Mariam de la Croix" qui va dans ce sens, repris en boucle par divers sites anti-impérialistes. Elle fait notamment état du témoignage de personnes comme un certain "Alix Van Burren, reporter vétéran de la Repubblica" qui ne sont mentionnées nulle part ailleurs dans un autre contexte sur le Net, et déploie une argumentation politique si élaborée qu'il pourrait s'agir d'un faux - voir à ce sujet cet article. Le texte n'a d'ailleurs été repris sur aucun blog à l'étranger.

 

En revanche le rôle des Occidentaux dans la bataille de l'information est plus clair et mieux établi.

 

Le 20 mai un article de Vincent Jauvert dans le magazine français le « Nouvel Observateur » racontait comment l'animateur du principal site Internet d'opposition basé en Suède s'est rendu au Qatar à Doha pour discuter avec les patrons de la chaîne Al-Jazeera dans le cadre d'un voyage tenu secret.Selon cet article, ces dernières années, quelques dizaines de cybernautes ont suivi des stages de protection informatique à l’étranger pour déjouer les pièges des services de renseignements syriens. En Jordanie, par exemple, l’ONG irlandaise Frontline leur a expliqué comment effacer des données à distance, échanger secrètement des e-mails ou stocker des fichiers sensibles, notamment des vidéos.


Fin février, trois semaines avant la révolte de Déraa, le site Shaam News a ouvert aux Etats-Unis. Un certain nombre de ses membres auraient acheminé ces matériels clandestinement par les aéroports de province ou par les frontières de la Jordanie, du Liban et de la Turquie.

 

Selon le Washington Post ,qui se fonde sur des fuites de Wikileaks, la chaîne Barada TV, installée à Londres, qui a commencé à émettre en avril 2009 mais s’est étoffée pour couvrir la vague de protestations en Syrie est proche du Mouvement pour la justice et le développement, un réseau d’opposants syriens exilés. Le Département d’Etat américain a financé ce mouvement à hauteur de 6 millions de dollars depuis 2006.

 

L'historien italien Domenico Losurdo a récemment détaillé les techniques de manipulation des images qui auraient été déployées par ces agents occidentaux autour des manifestations.

 

En France, à l'initiative du publiciste idéologiquement proche des néo-conservateurs étatsuniens Bernard-Henri Lévy, un texte a été publié dans Le Monde du 25 mai 2011 sous le titre SOS Syrie, qui dénonce les crimes commis par le régime de Bachar al-Assad et appelle à la solidarité avec le peuple syrien dans sa lutte pour la liberté. Burhan Ghalioun, écrivain, professeur à la Sorbonne, Subhi Hadidi, écrivain et journaliste, et Farouk Mardam Bey, éditeur on dénoncé cette initiative comme "indécente" car provenante de personnes " comme Bernard-Henry Lévy, qui se sont toujours illustrées par leur hostilité aux revendications légitimes du peuple palestinien et par leur coupable complaisance pour la colonisation des territoires occupés, y compris le Golan syrien" et de gens "qui ont applaudi l'invasion américaine de l'Irak et qui ne se sont apparemment pas repentis en constatant ses tragiques conséquences". Ils reprochent à des élus socialistes comme MM. Rocard, Hollande et Delanoë d'avoir mêlé leur signature à ce lobby.

 

Ainsi, comme en Libye naguère, les tentatives d'instrumentalisation du mouvement populaire sont particulièrement actives autour de la Syrie en ce moment.

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