Le gouvernement révolutionnaire népalais confronté au risque de la sécession
Mercredi dernier le ministre de la défense Népal, Sarat Singh Bhandari, a fait sensation, 15 jours seulement après son entrée au gouvernement, en déclarant : "Si les 22 districts du Téraï décident de faire sécession, aucune loi au Népal ne pourra l'empêcher." Le vice-président maoïste Mohan Baidhya 'Kiran' (dont la faction est en désaccord avec la stratégie actuelle du premier ministre Baburam Bhattarai, issu du même parti que lui) et le secrétaire général Ram Bahadur Thapa 'Badal' du PCUN(maoïste) ont délivré un communiqué de presse condamnant la déclaration et lancé un appel à manifester. Ils dénoncent la volonté de la bourgeoisie indienne de "sikkimiser" le Terai (c'est à dire l'annexer à l'Etat indien frontalier du sikkim).
Le Teraï est la plaine au climat tropical qui borde le Népal au sud, le long de la frontière indienne. Sa population colonisée par le royaume du Népal au 18ème siècle, fut alliée des Anglais (de la Compagnie des Indes orientales) au siècle suivant pour combattre le shah népalais. Les partisans de la sécession du Terai estiment que les structures locales ont été démantelées par le gouvernement de Katmandou pour permettre la confiscation de ses ressources : le Terai fournissant la majorité des terres arables, de la petite industrie népalaise et des ressources gazières sans que cela profite à ses habitants. Les habitants du Terai (qui représente la moitié de la population népalaise) sont historiquement liés à l'Inde (la zone a servi de refuge aux Hindous à l'époque de l'empire musulman des Moghols) et leurs organisations sont souvent liées à la mouvance nationaliste hindoue .En janvier-février 2007 peu de temps après la chute de la monarchie népalaise, des manifestations violentes avaient éclaté dans le Terai à l'instigation d'un petit groupe le Forum des droits du peuple madhesi/Madhesi People's Right Forum (MPR) et avec le soutien de cadres monarchistes, et le couvre feu avait dû être instauré dans de nombreuses villes. La révolte avait été maîtrisée au terme d'un accord avec le MPRF incluant la reconnaissance des droits culturels et une politique de non-discrimination dans le recrutement aux emplois publics. Le ministre Bandhari est responsable d'une alliance (du Terai, le Front démocratique uni madheshi - United Madhesi Democratic Front) qui avait provoqué une grève générale de seize jours en 2008 et dont le MPRF a fait partie jusqu'en septembre 2010.
Les maoïstes népalais ont été favorables depuis longtemps à la fédéralisation du Népal, projet auquel se sont aussi ralliés les autres partis politiques. Mais le modèle ne sera viable qu'en l'absence d'ingérence extérieure, notamment de l'Inde (qui s'est engagée à ne pas soutenir les sécessionnistes).
Or cette semaine on apprenait que le député américain républicain néo-conservateur (et chantre enthousiaste de la guerre en Irak dès 2001) Steve Chabot en visite à Katmandou avait une conversation avec le premier ministre népalais ainsi qu'avec le chef d'état major de l'armée. Chabot est membre de la commission des affaires étrangères de la chambre des représentants et y préside le sous-comité Proche Orient-Asie du Sud. Le but de sa visite n'est pas précisé par les médias, mais le profil du personnage peut faire craindre un risque d'ingérence directe. La presse népalaise annonce aussi que USAID (agence qui finance le soft power étatsunien à l'étranger) a fait savoir qu'elle donnera 65 millions de dollars supplémentaires au Népal pour "renforcer les institutions démocratiques du pays", promouvoir l'éducation des jeunes, mener des politiques de santé publique et améliorer la productivité de l'économie népalaise. La liste des organismes bénéficiaires de cette aide n'est pas publique. La sécession madhesi (du Terai) est une des cartes entre les mains des Occidentaux pour faire pression sur les révolutionnaires népalais.
FD
Le Cap-Vert chouchou des institutions occidentales
Dans son rapport à l’occasion de sa réunion annuelle avec le Fonds Monétaire International (FMI) la semaine dernière, la Banque mondiale distingue le Cap Vert, archipel à l'ouest de l'Afrique,comme faisant partie des quatre pays (avec l'Ethiopie, le Ghana et le Malawi) du continent noir qui remplissent les conditions pour réaliser les Objectifs Millénaires du Développement (qui incluent des objectifs de santé et de lutte contre la pauvreté). La Banque le félicite pour ses innovations, notamment la gouvernance électronique ou la Maison du Citoyen
Autrefois pays socialiste non-aligné, qui dut son indépendance à la guérilla de type "guévariste" inspirée par Amilcar Cabral, le Cap Vert depuis les années 1990 n'a cessé de se rapprocher des Occidentaux. En 2006 il a accueilli les premiers exercices militaires de l'OTAN sur le sol africain, deux ans après que George W. Bush ait offert (en vain) la participation de l'OTAN aux côtés des troupes de l'Union africaine pour le "maintien de la paix" au Soudan.
Le Cap Vert a fait partie des rares pays africains a voter à l'ONU la reconnaissance du Conseil de transition libyen début septembre. Il soutient le Maroc sur la question du Sahara occidental. Il a intégré l'Organisation mondiale du commerce en décembre 2007 après avoir tout au long des années 1990 privatisé sa faible industrie et ses services publics (vendus aux ex colonisateurs portugais).
L'économie du pays étant entièrement tournée vers l'extérieur, les hommes ont émigré. 90 % des chefs de famille sont des femmes, la plupart célibataires et pauvres (voir l'article de Tobias Engel en 2003 dans Le Monde Diplomatique) qui "qualifiait le Cap-vert de"théâtre du développement fictif". A l'inverse trois ans plus tard le journaliste sénégalais Chérif Elvalide Seye, conseiller du président de droite Abdoulaye Wade écrivait au contraire :"Plus de nombreuses filles-mères, plus d’enfants pieds nus, plus de vieilles guimbardes poussives. Le pays a fini par avoir raison de l’adversité de la nature. Sa gestion vertueuse a fini par payer. Quand les autres pays sahéliens distribuaient l’aide alimentaire, le Cap-Vert pratiquait un système dit de capitalisation. L’aide était vendue et le produit réinvesti dans des projets de reboisement ou d'hydraulique rurale." Il est certain en tout cas que la bonne image du Cap vert aux yeux des Occidentaux lui attire des visites touristiques. Pour un pays de 335 000 habitants c'est une aubaine qui, par l'afflux de devises, a contribué à l'entrée de l'archipel dans la liste des pays à revenu intermédiaire. En ce sens le Cap vert est un modèle de ce que les Etats vassaux de l'Occident peuvent obtenir comme récompense lorsqu'ils sont de taille modeste.
Le pays, redevenu social-démocrate (social-libéral) en 2001, est repassé à droite en août dernier et confirmera sans doute son orientation pro-occidentale dans les années qui viennent.
Les soldats de la Kfor tirent sur des manifestants serbes au Kosovo
Après la reconnaissance unilatérale de l'indépendance du Kosovo par les principales puissances occidentales (indépendance à ce jour non reconnue par l'Organisation des Nations Unies), les autorités albanophones de Pristina ont franchi un nouveau pas dans l'unilatéralisme cet été en tentant d'instaurer des check-points douaniers entre les districts du nord du Kosovo à majorité serbe et la Serbie non-kosovare.
Cette mesure viole la résolution 1244 de l'ONU (stipulant l'intégrité territoriale de la Serbie) et revient à vouloir couper définitivement les Serbes kosovars des Serbes du reste de la Serbie. Des groupes de Serbes du Nord du Kosovo ont réagi en bloquant les forces de police des autorités albanophones, en incendiant des postes douaniers et en installant des barricades en août dernier.
Ces actions de Serbes kosovars ont embarrassé Belgrade engagé dans une négociation avec Pristina afin de faciliter la candidature de la Serbie à l'entrée dans l'Union européenne, et n'ont donc guère fait l'objet de soutiens de la part du gouvernemebnnt serbe (Mme Merkel la chancelière allemande lors de sa visite le 23 août dernier ayant sommé à nouveau Belgrade de reconnaître le Kosovo si elle veut rejoindre l'UE). Paradoxalement c'est la Russie qui s'est trouvée la plus libre pour défendre l'intégrité territoriale de la Serbie : le 16 septembre, alors que la mission de police européenne Eulex envisageait de parachuter des fonctionnaires albanophones sur les postes douaniers, l 'ambassadeur russe en Serbie, Alexandre Konouzine, a quitté jeudi le Forum régional sur la sécurité dans les Balkans qui se tenait à Belgrade en raison du refus des participants d'examiner la situation actuelle au Kosovo. "Je suis surpris. L'Otan, la Kfor et la mission Eulex envisagent de déployer des douaniers kosovars aux postes-frontières dans le nord du Kosovo, ce qui revient à violer leur mandat et la résolution 1244. L'auditoire du forum n'a pas réagi. Y a-t-il des Serbes dans la salle? Le destin de vos compatriotes vous préoccupe-t-il?" a-t-il lancé au public serbe.
Le mardi 27 septembre, la Kfor (force de l'ONU au Kosovo composée majoritairement de soldats de pays de l'OTAN), a démantelé par la force dans la matinée une barricade érigée par des Serbes à proximité du poste de Jarinje.
A cette occasion les soldats occidentaux entourés d'une foule de 1 500 civils, n'auraient pas hésité à tirer avec des balles en caoutchouc. Selon le directeur de l'hôpital de Kosovska Mitrovica, Milan Jakovljevic, cité par l'agence serbe Beta, six Serbes blessés par balles ont été hospitalisés dans son établissement (au total le nombre de blessés d'élèverait à seize). Quelques heures plus tard, en représaille, l'explosion d'une bombe artisanale a fait quatre blessés dans les rangs de la Kfor.
Selon les déclarations de l'ambassadeur russe à l'agence Interfax, les civils serbes blessés auraient fait l'objet de tirs à balles réelles et non de balles en caoutchouc. Il a accusé l'OTAN de "provoquer un nouveau conflit dans la région". La Kfor, pour sa part invoque l'autodéfense, mais la Russie demandera une enquête auprès de l'ONU.
Les Serbes kosovars ont renforcé les dispositifs de barricades, notamment dans la ville de Mitrovica.
Parallèlement à ce regain de tension, l'enquête sur les trafics d'organes de prisonniers civils de 1998-99 dans lesquels serait impliqué l'actuel premier ministre kosovar (et ex chef de l'UCK) Hashim Thaci se poursuit sous la houlette de la mission européenne Eulex. Un américain John Clint Williamson a été désigné "procureur en chef" d'une équipe spéciale le 29 août dernier. L'Eulex a mis en accusation sept personnes dont un Turc Yusuf Ercin Sonmez et un israélien d'ascendance turque Moshe Harel tous deux en fuite. Beaucoup de Serbes du Kosovo s'indignent de la nomination de Williamson comme procureur en chef. Selon l'ex-président de la commission pour les affaires d’enlèvement et de disparition, Vladimir Bojovic les autorités serbes étaient au courant du trafic d'organes dès 2001 mais les organes judiciaires de MINUK (Mission d'administration intérimaire des Nations unies au Kosovo) à l'époque dirigés par Williamson ne voulaient pas coopérer, et celui-ci ne se serait occupé sous son mandat que de faire arrêter des officiels serbes accusés de crime de guerre.
Le CNT libyen divisé et répressif obtient la réconnaissance des Nations-Unies
Le Conseil national de Transition (CNT) libyen a obtenu (par 114 voix) la reconnaissance de l'Assemblée générale des Nations-Unies : seuls 17 pays se sont opposés et 15 se sont abstenus. L'Angola pour la Communauté de développement d’Afrique australe (SADC) a présenté une motion contestant la procédure d'accréditation du CNT, et les pays de gauche latino-américain (dont Cuba, le Vénézuéla et la Bolivie) ont défendu une motion refusant sur le fond la légitimité du nouveau régime libyen. Le représentant de l'Egypte a pris la parole pour demander à l'ONU de ne pas soutenir la motion latino-américaine qui a été écartée. Les pays qui ont voté contre la reconnaissance sont donc : l'Angola, la Bolivie, Cuba, la République démocratique du Congo, l'Equateur, la Guinée Equatoriale, Kenya, le Lesotho, le Malawi, la Namibie, le Nicaragua, l'Afrique du Sud, le Swaziland, la Tanzanie, le Venezuela, la Zambie, le Zimbabwe.. Les abstentions : l'Algerie, Antigua et Barbuda, le Cameroun, la République Dominicaine, le Salvador, l'Indonesie, le Mali, la Mauritanie, le Nepal, Saint Vincent et les Grenadines, l'Arabie séoudite (bizarrement...), le Surinam, Trinidad et Tobago, l'Ouganda, l'Uruguay. Beaucoup de pays n'ont pas pris part au vote : l'Albanie, la Biélorussie, le Centrafrique, la Corée du Nord, l'Erythrée, la Guinée, la Guinée Bissau, le Rwanda, la Somalie, le Burundi, le Cambodge, le Mozambique, le Myanmar, le Niger, le Pakistan, le Nigéria, Haïti, le Guyana, toute l'ancienne Asie centrale soviétique. A noter que des pays réputés non-alignés sur l'Ouest comme le Soudan, le Sri Lanka, la Syrie et le Liban ont voté en faveur de la reconnaissance du CNT...
Sur le terrain le CNT enregistre deux échecs cuisants : les fiefs kadhafistes de Syrte (ville natale de Kadhafi) et Bani Walid (bastion de la puissante tribu des Warfalla) pourtant encerclés par les insurgés et bombardés par l'OTAN résistent à leurs assaillants. A cela s'ajoute que, comme le reconnaissait le Figaro lui-même il y a huit jours, une grande partie du désert du Fezzan reste loyal à Kadhafi (ce qui peut permettre à ses partisans notamment de contrôler l'approvisionnement des villes en eau). Les médias dominants estiment que les fidélités tribales des villages du désert à Kadhafi sont imputables au caractère arriéré de ces régions, et à la présence de miliciens kadhafistes venus du Darfour. Ils estiment que le ralliement de ces zones au nouveau régime ne saurait tarder, mais l'ex-guide de la révolution garde de sérieux moyens financiers pour acheter des soutiens dans cette région.
Par ailleurs le CNT, déchiré par les dissensions entre ex-dignitaires du régime de Kadhafi et islamistes supporters de Abdoulhakim Belhaj, a échoué aujourd'hui à constituer un gouvernement.
Les partisans du CNT en revanche restent particulièrement efficaces en matière d'emprisonnement et d'exécutions sommaires (comme l'avait été le gouvernement pro-occidental en Irak après la chute de Saddam Hussein).
Les prisons étant pleines, les anciens partisans de Kadhafi, ou présumés tels, civils ou militaires (et notamment beaucoup de Noirs arrêtés au faciès), sont parqués dans des écoles, commes les 420 encore entassés (le 17 septembre) dans l'école secondaire de Misrata. A Tripoli 800 corps présentés comme des "pro-Kadhafi" ont été entassés dans un cimetière sans moyen d'identification. Des villages entiers ont été vidés comme Tawarga, peuplé de Noirs d'abord déplacés dans un camp de réfugié lequel a été attaqué par les insurgés de Misrata. Impossible de savoir si les habitants de Tawarga ont été tués par les bombes de l'OTAN ou par les insurgés. Ils sont en tout cas introuvables.
Ce triste bilan est à comparer au fait que selon la Croix rouge il n'y aurait eu qu'un millier de disparus imputable aux actions militaires de Kadhafi depuis le début du soulèvement. Un chiffre très éloignés des 50 000 avancés par le CNT et qui a été utilisé à tort par la propagande occidentale pour justifier l'intervention de l'OTAN (l'OTAN ayant elle-même tué, semble-t-il, un millier de personnes dans ses bombardements).
Nicaragua : Coup d'envoi réussi pour la campagne électorale sandiniste
200 000 personnes étaient présentes samedi 10 septembre dans la capitale régionale et deuxième ville du Nicaragua Matagalpa (110 000 habitants), dans le centre-nord du pays, pour le meeting de lancement de la campagne électorale du président sortant sandiniste Daniel Ortega.
Le président ortega a rappelé à cette occasion le bilan de son action, notamment l'octroi de 136 000 titres de propriété à des paysans expulsés de leur terre (il en promet 150 000 pour son prochain mandat), la prise en charge de l'équipement en lamelles de zinc de 267 000 toits par l'Etat depuis 2007 (le "plan techo"), l'électrification de 156 000 logements. 100 000 Nicaraguayens ont bénéficié de l'opération Milagro (avec l'aide de médecins cubains) pour les soins des yeux. Tous ces chiffres a assuré le président devraient encore augmenter sous son second mandat, tandis que l'accès à la téléphonie mobile devrait toucher 1 million de nicaraguayens en plus dans les cinq prochaines années.
Alors que les sandinistes voient dans cette mobilisation paysanne un signe favorable pour les élections présidentielles qui auront lieu le 6 novembre, la presse de droite nicaraguayenne estime que Matagalpa est un fief sandiniste et qu'une telle mobilisation aurait été impossible dans les districts plus urbains de la zone pacifique. Pourtant il y a seulement sept ans, le Parti libéral constitutionaliste (PLC) faisait jeu égal avec le Front sandiniste de libération nationale (FSLN) dans cette zone. La démonstration de force du FSLN dans cette ville samedi fut donc un signe fort d'adhésion des paysans de la région à son programme.
Selon la chaîne sandiniste Multinoticias, beaucoup de paysans qui souhaitaient assister au meeting sandiniste n'ont pas pu disposer d'assez de véhicules pour s'y rendre. Une adhésion citoyenne qui est aussi le résultat de l'action conjuguée du gouvernement central et des autorités locales sandinistes : dans ce seul district sept centres de santé ont été créés depuis 2007, la politique de santé et de prévention s'est développée, la mortalité maternelle a baissé de 40 % et la formation intensive de maîtres d'école dans l'école normale José Marti (du nom du libérateur cubain de 1898) rénovée en 2009, a permis de faire reculer l'analphabétisme à un taux de 0,3 % (contre encore plus de 10 % au Honduras voisin).
L'épouse du président Rosario Murillo en sa qualité de coordonatrice du Conseil de la communication et de la citoyenneté a estimé que cette mobilisation manifestait le soutien populaire au projet d'un Nicaragua "plus chrétien, plus socialiste et plus solidaire" (slogan sandiniste qui est aussi la devise de la municipalité sandiniste de Matagalpa).
F. Delorca
Face à la crise américaine, le yuan chinois émerge comme monnaie de réserve
Le Nigeria, l’un des plus importants producteurs de pétrole en Afrique a annoncé lundi dernier avoir rajouté le yuan chinois à ses monnaies de réserves à côté du dollar américain, l’euro, ou la livre sterling pour près d'un dixième de ses réserves de change. Les commentateurs y voient un effet de la baisse historique de la note du crédit américain.
La Banque du Peuple (banque centrale) de Chine a déjà signé des accords de change pour libeller les échanges commerciaux en yuan avec divers pays, dont le Brésil, la Corée du Sud, Singapour, la Malaisie, l'Indonésie, le Belarus, l'Argentine et l'Islande. Et lors d'une réunion d'avril 2011, les dirigeants du BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) ont accepté d'encourager l'utilisation de leurs propres devises dans les règlements commerciaux entre ces pays.La Chine par ailleurs envisage de développer à l'étranger des marchés en yuan à l'étranger pour permettre aux entreprises d'échanger leurs devises contre cette monnaie.
Pour autant la question de savoir si le yuan peut devenir une monnaie internationale de réserve fait débat en Chine et ailleurs. Pour des raisons historiques, le yuan n'était toujours pas convertible jusqu'à très récemment pour les investissements ou les comptes de capitaux (mais al Chine vient d'annoncer sa "pleine convertibilité" pour 2015), par ailleurs la monnaie est maintenue à des parités fixes et les valeurs et les marchés financiers de la Chine ne sont pas suffisamment importants ni assez sophistiqués pour faire face à ce rôle du yuan. Il ne pourrait devenir une monnaie de réserve que si la Chine acceptait de faire du déficit commercial, ce qui n'est pas le cas pour l'heure (cf Le Quotidien du peuple).
Jusqu'à récemment au niveau mondial le dollar représentait près des deux tiers des réserves de devises mondiales ( 62% des réserves en taux de change en 2009) et l'euro un gros quart (27% en 2009). Vers 2016 la Chine (avec son taux de croissance à deux chiffres) pourrait devenir la première puissance économique mondiale avec un PIB qui dépasserait celui des Etats-Unis.Les Etats-Unis affichaient, début mai, des réserves monétaires pour un montant de seulement 143 milliards de dollars et la Chine pour 3 047 milliards. Selon Moneyweek.fr, "le seul poste où les Etats-Unis devancent encore la Chine est celui des stocks d’or officiellement détenus par les banques centrales soit, pour les Etats-Unis 8 133 tonnes, et pour la Chine 1 054 tonnes (qui devrait être « normalement » pour ce pays plutôt d’environ 10 000 tonnes)". Alors que la dévaluation progressive du dollar altère sérieusement la valeur des obligations détenues par les créditeurs. C'est donc le système financier mondial qui pourrait trouver un intérêt au remplacement au moins partiel du dollar par le yuan.
Le vice-premier ministre et ministre russe des Finances Alexeï Koudrine en mai 2010 pronostiquait que la monnaie chinoise serait une monnaie de réserve internationale dans dix ans. Le président de la Banque mondiale, Robert Zoellick, avait fait une prévision assez voisine en novembre 2009. Si elle se vérifie, le coût pour les Occidentaux pourrait accentuer encore leur déclin économique. Selon l'économiste newyorkais ancien conseiller de Bill Clinton, Nouriel Roubini, elle se traduira par un renchérissement du coût des emprunts pour les Etats-Unis et du coût des matières premières importées, ce qui pouvait se répercuter lourdement sur la consommation et la croissance. Il en concluait en 2009 dans le New York Times qu'il était temps pour Washington de "changer [ses] priorités", d’investir dans une infrastructure "en ruine, dans les énergies alternatives et renouvelables et le capital humain productif - plutôt que dans des logements inutiles et des inventions financières toxiques". Une sorte de course contre la montre semble engagée aux Etats-Unis pour sauvegarder leur hégémonie monétaire.
FD
Avec la guerre de Libye, les Touaregs sont persécutés et l'AQMI sort renforcée
Le ministre nigérien des Affaires étrangères, Mohamed Bazoum, a déclaré à l’issue de la première journée de Conférence internationale sur le Sahel hier que le conflit libyen a transformé la région en une "poudrière".
Selon «Sahel Intelligence», la direction de la protection de la sécurité du ministère français de la Défense, a reconnu dans une note du 18 juin dernier que «des armes sensibles, y compris des missiles mobiles terre-air puisés dans les arsenaux de guerre du régime libyen ont été acheminées vers le Mali à travers le territoire algérien». Les services algériens en auraient averti la France dès le mois de mars. L'inquiétude se portait notamment sur un lot de missiles "Sam7 abandonné à ciel ouvert par l´armée de Kadhafi avait été acheminé depuis Benghazi vers le Nord du Mali, via le Tchad, apparemment avec la complicité des insurgés libyens, car la frontière algérienne était des plus surveillée par les unités spéciales de l´armée algérienne (ANP) et de la gendarmerie" (source Algérie 360) .Le directeur du bureau de l´Officie international des migrations de l´ONU de Nouakchott, l´Américain Richard Ots, a confirmé à son tour récemment qu’Aqmi (Al Qaida Maghreb) a acquis en Libye non seulement des Sam 7 russes mais également des missiles américains de type Stinger dont sont dotées les armées de l´OTAN. Ces missiles pourraient menacer les avions militaires de l'OTAN mais aussi les avions civils maliens et nigériens. Le 5 juillet l'Aqmi a attaqué la caserne de Bassiknou se trouvant en Mauritanie à 45 km de la frontière malienne avec des armes moins sophistiquées que les Sam7 dont les islamistes seraient encore en train d'apprendre le maniement (ibid).
En début de semaine les nouvelles autorités libyennes ont confirmé que 200 voitures environ étaient passées au Niger. Au Niger, une source militaire a affirmé avoir "vu un convoi inhabituel et impressionnant de plusieurs dizaines de véhicules entrer à Agadez en provenance d'Arlit, une cité minière proche de la frontière algérienne, et se diriger vers Niamey par la route", témoignage qui a été corroboré par d'autres sources. On ignore quel rôle ces partisans de Kadhafi sont susceptibles de jouer au Nord du Niger (les déclarations officielles se sont bornées à signaler que l'ex-guide de la révolution libyenne n'était pas parmi eux). Selon les aveux de soldats de Kadhafi arrêtés il y a huit jours près de Beni Walid il existait un plan d'exfiltration de Kadhafi et des millions de dollars dont il dispose encore vers le Fezzan (Sud de la Libye qu'il contrôle toujours) voire vers le Niger d'où l'ex-leader libyen pourrait s'allier soit aux islamistes (actuellement en conflit avec les ex-dignitaires kadhafistes du Conseil national de transition libyen), soit plus sûrement avec les Touaregs toujours fidèles à Kadhafi pour entretenir la résistance. Ceux-ci font l'objet de persécutions racistes par le CNT au pouvoir à Tripoli. Selon El Watan, "dans un communiqué rendu public hier, le coordinateur du Mouvement touareg pour la Libye, Ishaq Ag Al Husseyni, fait état «de chasse aux Touareg et d’exécutions» par les rebelles au lendemain de la prise de Tripoli, qui ont suscité «des fuites collectives vers la frontière algérienne».Tous les Touaregs du Sud libyen auraient fui vers l'Algérie." Un important groupe, dont des femmes et des enfants, ayant fui la région de Oubari, a été signalé au village de Tarat, non loin de la frontière avec Illizi. «Elles sont dans le dénuement le plus total, vivant une situation des plus dramatiques. Privées de tout, sans aucun soutien, elles ne peuvent ni rebrousser chemin, de peur de subir des représailles, ni avancer vers l’Algérie, qui a refusé de les accueillir…»"
Le 8 septembre, les autorités nigériennes (qui ont reconnu le nouveau pouvoir libyen le 30 août) ont décliné la demande du CNT qui les priait de fermer les frontières du pays, en invoquant l'impossibilité pour eux de la protéger.
La tenue de la Conférence internationale sur le partenariat, la sécurité et le développement entre les pays du Sahel (Algérie-Mali-Mauritanie-Niger) à Alger hier, avec la participation de 38 délégations,dont les Etats-Unis, la France, la Russie, la Chine et le Royaume-Uni semble confirmer l'importance accordée par les Occidentaux de se coordonner avec l'Algérie, qui avait pu passer pour un un pays dans le collimateur après la victoire de l'OTAN à Tripoli. Selon l'expert Samuel Benshimon de Sahel Intelligence, c'était le but recherché par les autorités algériennes soucieuses de "détourner l’attention de l’opinion publique interne, après les déboires accumulés par la diplomatie algérienne dans la crise libyenne", et notamment leur participation en juillet aux côtés de l'Afrique du Sud à des négociations en vue de la livraison d'armes chinoises au colonel Kadhafi.
50ème anniversaire du Mouvement des Non-Alignés à Belgrade
600 diplomates (de plus d'une centaine de pays) et 178 journalistes étaient rassemblés à Belgrade lundi dernier 5 septembre pour fêter les 50 ans du Mouvement des non-alignés (MNA) dont le premier sommet s'était tenu dans cette ville du 1 au 6 septembre 1961.
Les membres du MNA se sont réunis pendant deux jours dans les locaux du parlement serbe, en présence du président Tadic, de son ministre des affaires étrangères et d'autres membres de son gouvernement, des ministres des affaires étrangères slovène, bosniaque et monténégrin, d'un secrétaire d'Etat croate et d'un ministre adjoint macédonien. Le dernier ministre des affaires étrangères de la Yougoslavie des années 1980, le croate Budimir Loncar, a pris la parole au cours de cette réunion.
Le ministre des affaires étrangères égyptien Mohamed Kamel Amr, dont le pays préside le MNA en ce moment, dans son discours introductif a souligné l'actualité des principes du Mouvement des non-alignés et appelé toutes les Républiques ex-yougoslaves à reconnaître l'Etat de Palestine et à voter dans ce sens lors de la prochaine session des Nations-Unies le 19 septembre prochain. La majorité des membres du MNA reconnaît déjà l'Etat de Palestine. Ce fut le sujet le plus politique de la conférence. Le ministre des affaires étrangères serbe a reconnu qu'il n'était pas prévu au départ qu'il soit inscrit à l'ordre du jour, mais il semble que l'Egypte ait fait un peu le "forcing" sur ce dossier, ce qui n'est pas allé sans embarrasser les Serbes qui ont de bonnes relations avec Israêl.
Le secrétaire d'Etat aux affaires étrangères cubain Abelardo Moreno Fernandez à la tribune a regretté l'inaction des Non-alignés face à la "manipulation du Conseil de sécurité" par les Occidentaux dans l'affaire libyenne. Son homologue iranien Mohammad Mehdi Akhondzadeh a critiqué, pour sa part, "une intervention et une politique arrogante" des Occidentaux en Afrique du Nord et au Proche-Orient.
Les pays européens présents étaient la Hongrie, la Finlande, l'Espagne et Chypre (qui fut avec la Yougoslavie le seul pays européen membre des Non-alignés en 1961).
L'initiative du président serbe Boris Tadic de commémorer les 50 ans du MNA à Belgrade a fait l'objet de critiques de la part d'atlantistes qui la jugeaient incompatible avec la candidature de la Serbie à l'entrée dans l'Union européenne. Le ministre des affaires étrangères Vuk Jeremic a cependant précisé que la Serbie resterait membre observateur et n'adhèrerait pas au MNA (en Europe seule la Biélorussie en est membre titulaire). Le président serbe dans son allocution devant le MNA a souligné la nécessité de prendre en compte l'avis de la majorité des nations de la planète que représente le MNA pour la prise des grandes décisions de notre temps, et l'engagement de son pays dans cette direction. Le petit fils du maréchal Tito, Joska Broz, fondateur du nouveau parti communiste serbe en 2010 (une fusion de trois partis d'extrême gauche), qui n'a pas été invité à ce sommet, a qualifié l'attitude de la Serbie d'hypocrite puisqu'elle peut la même année organiser une réunion avec l'OTAN et une avec le MNA. Beaucoup estiment que Belgrade cherchait surtout à endiguer la nouvelle vague de reconnaissance du Kosovo par des pays du Sud (le Bénin, la Guinée, le Niger et Sainte-Lucie cet été) et s'ouvrir des marchés dans le Tiers-monde à l'heure où ses produits ne sont plus compétitifs en Europe.
La ministre des affaires étrangères d'Afrique du Sud Maite Nkoana-Mashabane (qui dans son discours a surtout parlé de la prochaine conférence de l'ONU à Durban sur le changement de climat) a exprimé devant les médias à cette occasion sa volonté de renouer les liens entre son pays et le peuple serbe (ce qui s'est traduit par la signature d'un protocole de consultation mutuelle avec Belgrade), et beaucoup de représentants des pays du Tiers-Monde ont manifesté leur attachement au souvenir de l'engagement de la Yougoslavie de Tito à leurs côtés ainsi que le rôle du MNA dans la stabilité des pays du Sud. Le dernier sommet des non-alignés à Belgrade remontait à 1989, juste avant l'éclatement de la Yougoslavie. Le leader libyen Mouammar Kadhafi à l'époque était venu avec des chameaux dont il avait fait don au zoo de Belgrade.
La rencontre comme à l'accoutumé a permis diverses discussions bilatérales Sud-Sud (par exemple entre le Vietnam et la Tunisie, et le Vietnam et l'Angola).
Washington se heurte à la nouvelle politique turque en Méditerranée
Après le refus d'Israël de présenter ses excuses et d'indemniser les familles des victimes turques suite au massacre de militants pacifistes de la flottille pour Gaza l'an dernier, le gouvernement turc a annoncé de nouvelles sanctions à l'encontre d'Israël, dont l'une consistera à renforcer la présence militaire turque dans l'Est de la Méditerranée, ont annoncé jeudi les médias turcs.Le 7 septembre dernier, le chef de la diplomatie turque, Ahmet Davutoglu, avait annoncé la décision d'Ankara de geler toute coopération militaire avec Israël, de fermer l'espace aérien turc à l'armée israélienne et de saisir la Cour internationale de Justice (CIJ), tandis que les liens diplomatiques étaient réduits au strict minimum.
La politique turque du parti AKP, parfois qualifiée de "néo-ottomane" en ce qu'elle cherche à regagner une influence sur les territoires de l'ancien empire ottoman, a rendu quelques services aux occidentaux ces derniers temps. Ankara a par exemple condamné la répression en Syrie et soutenu le Conseil national de transition en Libye contre le colonel Kadhafi, ce qui devrait lui permettre aujourd'hui de jouer un rôle dans ce pays apparemment voué à connaître des troubles durables (résistance kadhafiste, et division au sein du CNT et entre les tribus).
Mais elle a aussi su prendre ses distances avec les Etats-Unis à plusieurs reprises depuis 2003 (où elle avait refusé de mettre à disposition ses bases pour l'invasion de l'Irak). En 2009 le président Recep Tayyip Erdogan s'était opposé à l'inculpation du président du Soudan par la Cour pénale internationale pour génocide. En ce qui concerne les relations turco-iraniennes les échanges commerciaux entre les deux pays ont été multipliés par dix en 9 ans dans les années 2000 et Ankara souhaite que la question du programme nucléaire iranienne soit traitée sur le même plan que celle de l'arme nucléaire israélienne, ce qui aux yeux de Washington affaiblit la position occidentale en faveur du désarmement iranien. Elle tient aussi un langage commun avec la Russie sur la question du dialogue avec le Hamas en Palestine.
Erdogan a annoncé hier qu'il se rendra en Egypte, en Libye et en Tunisie. En Israël des craintes s'expriment selon lequelles la Turquie pourrait influencer ces trois pays dans un sens défavorable à ses intérêts. Le ministre de la défense israélien Ehoud Barak s'est dit persuadé que la Turquie et Israël ne deviendront pas des ennemis et que cette crise n'était que passagère.
Ce durcissement intervient en tout cas à un moment où Israël est mis en difficulté par la perspective d'un vote de reconnaissance de l'Etat palestinien à l'Assemblée générale des Nations-Unies, une reconnaissance qui, note le quotidien Haaretz, pourrait entraîner notamment l'inculpation des dirigeants isréaliens devant la Cour pénale internationale de La Haye pour crime de guerre, du fait de l'occupation illégale de la Cisjordanie. Les membres du congrès pro-israéliens à Washington sont en tout cas sur le pied de guerre. La présidente de la commission des affaires étrangères de la chambre des représentants Ileana Ros-Lehtinen (une républicaine liée au lobby cubain d'extrême droite de Miami) a demandé au président Obama d'user de son droit de véto au conseil de sécurité de l'ONU sur ce sujet et présenté un projet de loi prévoyant que les Etats-Unis couperont toute contribution financière aux organes des Nations unies, si l'Assemblée générale accordait (à la majorité requise de 129 voix) à la Palestine même un simple statut de "non-membre" comparable à celui du Vatican.