Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Le blog de l'Atlas alternatif / L'autre info sur le monde

Haïti : après le tremblement de terre, la recolonisation

7 Juin 2010 , Rédigé par Atlasaltern Publié dans #Amérique latine-Caraïbes

Jérôme Brisson l'explique dans Rue89 : "Début mai, la firme américaine Monsanto, leader mondial des OGM, a annoncé un don à Haïti de 475 947 kilos de graines hybrides de maïs et de légumes. Ils seront distribués pendant douze mois aux paysans haïtiens avec l'aide d'autres multinationales (UPS et Kuehne+Nage). L'opération est soutenue par le gouvernement américain puisqu'elle s'inscrit dans le cadre du projet Winner, lancé en octobre dernier par l'Agence américaine d'aide au développement international (USAID) pour aider à construire une nouvelle infrastructure agricole en Haïti."

 

Les graines de maïs de Monsanto ne pouvant être resemées, les agriculteurs devront en racheter à Monsanto les années suivantes. USAID se veut rassurante en rappelant que l'aide de Monsanto ne concerne que 10 000 paysans.

Il existe cependant de sérieuses raisons de s'inquiéter : le directeur général du projet Winner n'est autre que Jean-Robert Estimé, qui fut ministre des Affaires étrangères pendant 29 ans sous la dictature des Duvalier. Il faut en outre rappeler queMonsanto  s’est depuis longtemps attiré la colère des écologistes, des militants pour la santé et des petits agriculteurs ; cela remonte à sa production de l’Agent orange durant la guerre du Vietnam. L’exposition à l’Agent orange a provoqué  des cancers chez un nombre considérable de vétérans US et le gouvernement vietnamien affirme que 400 000 Vietnamiens ont été tués ou handicapés par l’Agent orange et que 500 000 enfants sont nés avec des malformations congénitales à cause de leur exposition à l’agent. Via Campesina, la plus grande confédération paysanne du monde présente  dans plus de 60 pays, a traité Monsanto d’un des « ennemis principaux de l’agriculture paysanne durable et de la souveraineté alimentaire pour tous les peuples. » Ils affirment que, Monsanto et d’autres multinationales, en  contrôlant une part sans cesse croissante des terres et de la production  agricoles,  forcent les petits cultivateurs à quitter leur terre et leur métier. Ils affirment également que les géants de l’agroalimentaire contribuent au changement climatique et à d’autres désastres environnementaux, une conséquence de l’agriculture industrielle.

 

La société civile haïtienne se mobilise contre ce péril que le père spiritain Jean-Yves Urfié qualifie de "nouveau séisme". Le Mouvement Paysan Papaye (Mouvman Peyizan Papay- MPP) de Chavannes Jean-Baptiste s’est engagé à brûler les semences de Monsanto et a appelé à une marche de protestation contre la présence des multinationales à Haïti le 4 juin 2010, pour la journée mondiale de l’environnement.

 

Le risque d'invasion d'Haïti par les OGM n'est pas le seul symptôme de la recolonisation du pays. Dans une interview récente, Jean Ziegler, ancien rapporteur spécial de l'ONU pour le droit à l'alimentation, rappelait que les programmes successifs du FMI "ont réduit les droits de douane d’Haïti de 50 % à 3 %, en privant l’État d’une des rares ressources à sa disposition. Au début des années 1980, le pays était autosuffisant en riz. Aujourd’hui, il importe 75 % de ses besoins. Le riz subventionné en provenance de l’étranger a inondé le pays, ruinant des dizaines de milliers de familles paysannes, les chassant de leurs terres vers les bidonvilles". L’accord de partenariat économique (APE) imposé par l'Union européenne en 2008 va dans le même sens (malgré la mobilisation populaire à Haïti qui n'a pu que retarder sa signature). Le gouvernement haïtien est d'autant plus faible que ses infrastructructures ont été détruites par le tremblement de terre. Ce sont les Nations-Unies qui assurent le maintien de l'ordre. Le 27 mai dernier, l'armée des Nations-Unies a dispersé une manifestation d'étudiants aux abords du palais présidentiel et les ont poursuivi sur le Champ de Mars à Port-au-Prince où sont massés des milliers de sans-logis. Au moins six personnes ont été hopsitalisées du fait de l'usage de balles en caoutchouc. Des enfants et des vieillards ont été exposés à cette répression, qui n'a guère préoccupé les grands médias internationaux. La coalition Tet Kolé appelait à manifester pour protester contre la manière dont le président Préval et l'ONU géraient les conséquence du tremblement de terre.

 

F. Delorca

 

Lire la suite

Comores : crise dans un archipel au coeur de la géostratégie planétaire

3 Juin 2010 , Rédigé par Atlasaltern Publié dans #Afrique de l'Est - Grands lacs

Le président de l'Union des Comores Ahmed Abdallah Sambi a nommé dans la nuit de mardi à mercredi 26 mai un gouvernement d'intérim, à la veille de la fin théorique de son mandat présidentiel, a-t-on appris de source officielle.

 

La prolongation du mandat de M. Sambi a suscité la colère des habitants de Mohéli à qui revient normalement le tour d'assurer la présidence de l'Union des Comores, en vertu du principe de la présidence tournante entre les îles de Grande Comore, Anjouan et Mohéli.

 

Le 31 mai des membres de la communauté comorienne de France ont constitué un gouvernement d'union nationale en exil pour obtenir le départ du président Ahmed Abdallah Sambi, et en appellent à la France pour mettre fin à la crise politique de l'archipel.

 

Selon un communiqué, ce gouvernement en exil a été constitué à l'initiative des partis Mwashiwa et Jirma (Jeunesse Initiée et Rassemblée en Mouvement pour Anjouan), ainsi que des femmes mohéliennes de France. Composés de onze membres, tous originaires des trois îles de l’archipel (Anjouan, la Grande Comore, Mohéli), ce gouvernement en appelle à la France, « le pays mère » pour sortir de la crise politique.

 

Le 1er juin il était aussi question de la création d'un gouvernement dissident sur l'île de Mohéli, de sorte que l’armée comorienne a dressé mardi des barricades dans la région centre de l’île et a quadrillé les rues de Fomboni, le chef-lieu.

 

Le président sortant aurait pour sa part eu recours à l'aide libyenne pour sa sécurité.Selon Jeune Afrique, il pourrait aussi compter sur le soutien diplomatique de l'Iran et des monarchies du Golfe.

 

Des étudiants mohéliens ont quant à eux hissé le 1er juin le drapeau de l'ancien colonisateur français sur le site de l'Université de Mvuni sans qu'on connaisse la finalité véritable de cette provocation.

 

La France a récemment renforcé sa présence à Mayotte (île qui selon l'ONU devrait aujoud'hui faire partie des Comores) qu'elle a décidé de transformer en département d'Outre-mer en 2011. La zone présent un intérêt économique du fait de ses réserves en gaz et pétrole, mais surtout stratégiques. 1 500 militaires français y sont basés. Mayotte permet de garder sous contrôle Madagascar, Maurice, les Seychelles et les Comores et surveiller le commerce maritime qui représente 90% des échanges commerciaux intercontinentaux. b52.jpg

 

C’est à partir de la base de l’île de Diego Garcia dans l’océan indien que les Etats-Unis ont bombardé l’Irak pendant la première guerre du golfe et l’Afghanistan après l’attaque du 11 septembre. Les forces occidentales ont quadrillé les régions pétrolifères de l’Afrique. La France et les Etats-Unis, de concert, contrôlent les routes maritimes et enserre l’Asie centrale grâce à l’installation de bases militaires à Abou Dhabi, Diego Garcia, La Réunion ; Djibouti, Mayotte (voir le blog d'Eve Ressaire à ce sujet). Les Etats-Unis en 2008 avaient manifesté leur intérêt pour les Comores en y dépêchant leur secrétaire d'Etat adjoint aux affaires africaines Mme Jendayi Fraze. Ils ont d'ailleurs participé à une médiation avec la France et l'Afrique du Sud à Anjouan cette même année.

 

Anjouan en 1997 avait demandé à rejoindre la France. L'apparition de drapeaux français à Mohéli ces derniers jours pose la question du rôle de la France dans cette crise. La presse présente l'ancien colonisateur comme étant en retrait et laisse entendre que les initiatives pro-françaises des Mohéliens ne seraient pas provoquées de l'extérieur.

 

L'Union africaine a en tout cas dépêché un commissaire à la paix et la sécurité afin de favoriser une solution sans ingérence des puissances occidentales.

 

 

Lire la suite