Baromètre des relations entre Paris et Washington


1) Le Venezuela
Hugo Chavez a été accueilli à Paris le 19 novembre, pour l'affichage médiatique dans l'espoir qu'il obtienne la libération de la citoyenne franco-colombienne Ingrid Betancourt détenue par les FARC, mais surtout pour raffermir les liens économiques entre les deux pays : le ministre vénézuelien de l'Energie, Rafael Ramirez, a déclaré le mardi 20 novembre à Paris souhaiter que la France devienne "le premier investisseur" dans son pays (AFP).
La rupture récente des négociations entre Chavez et Uribe pour la libération des otages est d'ailleurs soutenue avec ferveur par les Etats-Unis contre les intérêts de Sarkozy (http://www.aporrea.org/tiburon/n105370.html).
2) La Chine
Le président Sarkozy en visite à Pékin s'est montré modéré à l'égard de la Chine, rappelant que Paris était hostile à l'indépendance de Taiwan, ainsi qu'à celle du Tibet. Il a félicité Pékin pour son rôle dans le conflit du Darfour et pour son influence sur la Corée du Nord. La France a signé des contrats pour un montant de 20 milliards d'euros à l'occasion de cette visite (AFP 27 novembre 2007).
Sur d'autres dossiers l'axe Washington-Paris fonctionne bien. Ainsi Le Monde du 25 novembre félicitait-il le président Sarkozy de s'être "laissé convaincre" d'impliquer davantage l'armée française dans la guerre d'Afghanistan, que le journal qualifie à tort de "première opération de combat de l'OTAN en dehors de ses frontières" (oubliant ainsi la guerre en Yougoslavie).
Sur le cas Rumsfeld, le procureur Jean-Claude Marin, sur instruction du garde des sceaux, vient de classer sans suite une plainte d'associations de défense des droits de l'homme contre l'ex-secrétaire à la défense américain, en faisant une application extensive des règles d'immunité prônées par la Cour pénale internationale (http://www.alterinfo.net/Le-Cas-Rumsfeld-La-FRANCE-lui-offre-une-immunite-!_a14111.html).
FD
Arrogance néo-coloniale espagnole
L'incident révèle les ambigüités du régime politique espagnol qui, sous la pression des milieux associatifs en ce moment, doit effectuer un travail de mémoire sur les crimes du franquisme dont il est l'héritier. Il révèle aussi combien cette monarchie a partie liée avec le colonialisme, ce qui n'a pas manqué de susciter des réactions en Espagne (http://larepublica.es/spip.php?article7792), où le républicanisme connaît un regain de ferveur.
L'Empire en Géorgie
Nos médias s'intéressent aux moines birmans, ou aux opposants à Mugabe... mais tardent à braquer les projecteurs sur des manifestations populaires contre des régimes autoritaires à la botte des Etats-Unis.
En septembre 2007, l'ex-ministre de la défense, autrefois personnage clé du gouvernement pro-occidental géorgien (http://www.armees.com/spip.php?page=imprimer&id_article=8494), Irakli Okrouachvili a été arrêté, comme par hasard juste après avoir accusé le président Mikhaïl Saakachvili d'avoir dans le passé ordonné le meurtre de plusieurs personnalités « importantes et influentes».Le prétexte de l'accusation - « extorsion, blanchiment d'argent, d'abus de pouvoir et de négligence lorsqu'il était en fonctions au ministère de la Défense » - n'a pas convaincu grand monde. Plusieurs milliers de manifestants se sont réunis le 28 septembre devant le Parlement à Tbilissi pour dénoncer cette arrestation à l'appel des partis d'opposition(http://www.russomania.com/imprimer.php3?id_article=4029).
Mais la position du président Saakachvili (qui se sait soutenu par les Etats-Unis) n'a pas faibli. Il a annoncé le prolongement (illégal) du mandat du parlement (où il a la majorité) pour un an (officiellement pour faire coincider les législatives avec l'élection présidentielle). Devant la persistance des manifestations, et pour empêcher qu'Okrouachvili y participe, le président Saakachvili aurait purement et simplement organisé son enlèvement jeudi, selon la juriste Eka Beseliya et l'aurai envoyé en direction de la France. La police a fini par déclarer que l'intéressé était désormais "en Allemagne pour raison de santé"...
Ces pratiques commencent à inquiéter les alliés de Tbilissi.
Le secrétaire d'Etat adjoint américain pour l'Europe Daniel Fried a rencontré jeudi le leader de l'opposition Georgy Khaindrava (lui aussi un ancien ministre de Saakachvili) pour lui demander si cette opposition était favorable à l'entrée de la Géorgie dans l'OTAN et les agences européennes comme l'est l'actuel gouvernement... au cas où le peuple renverserait prochainement Saakachvili. Le secrétaire général de l'OSCE Marc Perrin de Brichambaut de son côté rencontrait aussi des opposants à Tbilissi le même jour (http://www.kommersant.com/p821359/Georgia_Opposition_Rally/). Il est vrai que l'opposition elle-même comprend des éléments "récupérables" par Washington, si M. Bush sait faire preuve de finesse. Par exemple Salome Zourabichvili, ex diplomate française dont la nomination comme ministre des affaires étrangères de Saakachvili avait provoqué naguère une mini-polémique en France (Le Monde 18 mai 2004), et qui dirige aujourd'hui le mouvement "La voie de la Géorgie" (sakartvelos gza) (http://www.georgiatoday.ge/article_details.php?id=3814).
Dès lors que les dirigeants de l'Empire commencent à s'intéresser à l'opposition géorgienne, la grande presse fait de même. Le Figaro du 1er novembre 2007 a couvert l'enlèvement de l'ex ministre de la défense. Le Monde du 2 novembre 2007 parle des 70 000 opposants rassemblés contre le président géorgien à Tbilissi (http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3214,36-973749@51-973116,0.html). Ils auront quand même attendu plus d'un mois.
Un embargo absurde

Les Etats-Unis et l'irrédentisme kurde
Les voici en tout cas en ce moment en train d'armer lourdement les Kurdes contre l'Iran, mais aussi peut-être - et ce serait nouveau - contre leur allié de toujours, la Turquie. Rien n'est encore totalement prouvé, mais la saisie d'une très grande quantité d'armes américaines tombées entre les mains du PKK éveille des soupçons : se peut-il qu'elles aient toutes été détournées de leur destination initiale ? Un article de Justin Raimondo initialement paru sur antiwar.com pose la question, tout en attribuant les éventuelles livraisons d'armes à des incohérences politiques du Pentagone (http://www.voltairenet.org/article152634.html)
Il est vrai que les liens avec la Turquie se sont distendus depuis qu'Ankara avait refusé en 2003 de mettre son territoire à la disposition des troupes américaines pour une attaque contre l'Irak, mais de là à ce que Washington favorise sa déstabilisation via les Kurdes ... La question kurde est en tout cas en passe de rapprocher la Turquie de l'Iran - les deux pays travaillent déjà ensemble sur le dossier (http://www.liberation.fr/actualite/reuters/reuters_monde/287819.FR.php) - ce qui n'arrangera peut-être pas le projet américain de guerre contre Téhéran.