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21 mars 2013 4 21 /03 /mars /2013 21:51

Esprit Corsaire  http://www.espritcorsaire.com/?ID=54- Dernier épisode dans la guerre de propagande en Syrie, l’appel à la mobilisation générale lancé à la télévision le 10 mars dernier par le grand mufti Ahmad Badreddine Hassoun, appelant les syriens au « jihad » pour défendre leur pays contre le « complot » de l’étranger.

 

Les forces armées loyalistes se battent pour tenir l’axe Damas- Homs- Hama. La moitié des effectifs de l’armée syrienne serait aujourd’hui concentré dans la capitale. Même si l’opposition parvenait à prendre le contrôle d’une partie du centre-ville, le régime pourrait continuer à bombarder la ville et à défendre les zones habités par ses partisans. En cas de chute de Bachar al-Assad , la ligne de contrôle Damas- Homs- Hama s’effondrerait probablement mais des poches de résistance à Damas, sur la côte et autour de Homs et Hama, continueraient à empêcher une consolidation de l’opposition sunnite sur l’ensemble du territoir

 

Dans tous les cas de figure, la mutation progressive des institutions du régime en un conglomérat de milices et l’atomisation communautaire du pays rendront très difficile le maintien d’institutions étatiques comme l’armée et la police, capables de rétablir un semblant de sécurité sur le territoire.

 

 

Afrique -Asie  http://afrique-asie.fr/component/content/article/75-a-la-une/5151-bahar-kimyongur-a-l-onu-violences-sectaires-ou-genocide-anti-alaouite.html  "Les comités populaires armés par le gouvernement ne sont guère homogènes sur le plan religieux : ils sont assyriens à Qamishli, arméniens à Kassab et druzes à Jaramana ou à Soueida. Ils sont sunnites à Raqqa, à Hama, à Deraa ou à Deir Az Zawr. Ils sont alaouites, chrétiens et sunnites à Tartous et à Lattaquié. Ils sont également mixtes à Homs. Ils sont Palestiniens sunnites à Nairab (Alep) et à Yarmouk (Damas). Ils sont chiites à Sayyida Zeinab à Damas ou dans les villages d’Al Foua et Kafraya dans le Nord. Ils sont chrétiens dans la «  Vallées des chrétiens »…"

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28 juillet 2012 6 28 /07 /juillet /2012 14:13

Yemen.pngSelon "Hood" un groupe de défense des droits de l'homme au Yémen, les forces de sécurité (toujours dirigées par un membre de la famille du dictateur déchu Ali Abdallah Saleh) entretiendraient un réseau de prisons secrètes où sont perpétrées des tortures malgré l'ordre du ministre de l'intérieur de libérer tous les détenus politiques. L'information pour l'heure n'est pas reprise par d'autres groupes. Il est clair en tout cas que les violations des droits de l'homme demeurent nombreuses (et ignorées des médias occidentaux) dans ce pays à l'instigations des forces de sécurité. Ainsi le 7 juillet, les forces de l'ordre à bord de trois véhicules blindés et des tireurs embusqués ont tiré sur des manifestants à Aden.

 

Ali Abdallah Saleh renversé par le "printemps arabe" l'an dernier est loin d'avoir renoncé à tout rôle politique dans son pays.Selon les déclarations du secrétaire général (numéro 2) du Mouvement sudiste (une coalition informelle réunissant des groupes politiques dont certains veulent que le sud du Yémen fasse sécession du reste du pays), le général à la retraite Abdallah Hassan al-Nakhibi, dans le journal Akhbar Alyawam, des émissaires de Saleh auraient rencontré Hassan Nasrallah à Beyrouth pour lui faire savoir qu'il serait prêt à livrer des armes de la garde républicaine à la rébellion houtiste (chiite) dans l'extrême nord du pays. Ce responsable accuse d'ailleurs l'Iran d'organiser des sabotages dans le Sud, et d'avoir choisi de déstabiliser le Yémen pour compenser une éventuelle perte de la Syrie (où les défections du régime baasiste se sont multipliée récemment). Un officiel yéménite a d'ailleurs fait avoir  sous couvert d'anonymat au journal koweitien Al Seyassah qu'un diplomate syrien serait dans le réseau de neuf membres arrêtés par les autorités de Sanaa la semaine dernière. Ces rumeurs sont à prendre avec précaution car elles coïncident avec une forte campagne anti-syrienne et anti-iranienne sur de blogs yéménites en anglais visiblement proches des Occidentaux.

 

Des sources du Congrès général du peuple affirment aussi que des membres de la famille de Saleh ont pris contact avec les représentants de la Russie et de la Chine à l'ONU, elles aussi non démontrées.

 

Les accusations d'ingérence se multiplient dans des directions opposées au Yémen. Si les alliés des Occidentaux affirment que l'Iran avance ses pions dans ce pays, la TV iranienne Press TV, elle cite un expert libanais Moufid Jaber du Centre d'études et de relations publiques sur le Proche Orient (Center for Middle East Studies and Public Relations) - probablement ce que France 24 appelle le Middle East center - qui accuse les services secrets israéliens d'être derrière diverses tentatives de déstabilisation du pays, y compris via Al Qaida qui a revendiqué l'attentat qui a coûté la vie à 25 personnes devant l'école de police de Sanaa le 11 juillet dernier et rappelle que le nouveau président yéménite a été imposé au pays par les Occidentaux. La position stratégique de ce pays au sud des pétromonarchies où la révolution populaire n'a pu aller à son terme explique sans doute la multiplication des informations invérifiables et la discrétion des ONG occidentales face à l'ampleur de la répression.

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13 juillet 2012 5 13 /07 /juillet /2012 11:57

morsi.pngLe 11 juillet le nouveau président égyptien issu des rangs des Frères musulmans Mohamed Morsi a réservé sa première visite à l'étranger à l'Arabie Saoudite où il a rencontré le prince Salman ibn Abdel-Aziz .

 

Cette visite intervient alors que M. Morsi venait d'engager une épreuve de force avec l'armée en réunissant le parlement officiellement dissous par la Haute Cour constitutionnelle, celle-ci ayant finalement hier suspendu la décision du président.

 

Selon l'essayiste David P Goldman, l'Egypte très endettée ne tient financièrement en ce moment que grâce aux prêts de l'Arabie saoudite. Si celle-ci suspend son aide, l'économie s'effondre. Or Ryad est en de mauvais termes avec les Frères musulmans du Caire (lesquels ont d'ailleurs effectué des gestes en direction de l'Iran) et soutient les militaires. En revanche l'administration Obama, qui avait pris contact avec les Frères musulmans en décembre dernier, soutiendraient tacitement Morsi. Selon Jackson Diehl  dans le Washington Post du 8 juillet Hillary Clinton et Leon Panetta auraient fortement fait pression sur les militaires pour qu'ils reconnaissent fin juin la victoire électorale de Morsi, mais cela aurait rendu furieux aussi bien les généraux que les Israéliens (qui redoutent la montée en puissance des islamistes). Mais le tandem Morsi-Obama est sérieusement handicapé, dans cette épreuve de force par la crise économique persistante

 

Certes il y a aussi le Qatar qui, pour sa part, soutient ouvertement Morsi. Il a promis un investissement de 10 millions de dollars en Egypte et la chaîne Al -Jazeera a fait compagne pour le candidat des Frères musulmans. En outre selon la chaîne du Hezbollah libanais Al Manar,  la "Banque pour le développement et l'agriculture" aurait vendu des millions d'hectares à une association qatarie, plaçant ainsi des milliers de paysans égyptiens sous la dépendance directe de ce pays. Toutefois cette information est des plus imprécises. Le prénom du Dr Barghach signalé comme membre du Conseil consultatif (parlement) source de l'information n'est pas mentionné, de sorte que l'on ne trouve aucun élément sur lui sur Internet. La banque en cause est peut être la "Principal Bank for development and agriculture" mais même avec cet intitulé, il n'y a aucun moyen de recouper cette information.

 

Mais quoi qu'il en soit, l'aide du Qatar qui se chiffre en millions (alors que celle des Saoudiens est évaluée en milliards) ne peut couvrir le besoin de financement de l'économie égyptienne évalué à 20 milliards de dollars par an. Il est donc probable que la dépendance financière de Morsi à l'égard de Ryad joue un rôle modérateur dans son conflit avec les militaires dans les mois qui viennent.

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10 juin 2012 7 10 /06 /juin /2012 09:58

syrie.jpgLes 25 et 26 mai derniers, le village syrien de Houla (centre du pays) a été la cible d'une attaque qui a fait plus de 100 morts, dont une moité d'enfants, attaque dans un premier temps imputée par l'opposition armée et par leurs soutiens inconditionnels dans le médias occidentaux par des "bombardements" perpétrés par l'armée syrienne. La plupart des victimes ont été abattues par des balles tirées à courte distance, les autres ayant péri sous des obus d'artillerie. Dans un premier temps (cf communiqué du 27 mai et non pas "sans désigner de coupables" comme le rapportent des sources pro-Assad) le Conseil de sécurité avait condamné les tirs d'artillerie et de chars de l'armée loyaliste, puis le Haut commissariat de l'ONU aux droits de l'Homme a mis en cause des "miliciens pro-régime". Le conseil des droits de l'homme de l'ONU à Genève le 1er juin a demandé à la commission d'enquête internationale, qui agit sous mandat du Conseil depuis août 2011, "de conduire une enquête spéciale exhaustive, indépendante et sans entrave en accord avec les standards internationaux sur les évènements de Houla" par 41 voix contre 3 (Chine, Russie et Cuba) et 2 abstentions (Ouganda, Equateur). La mission d'enquête gouvernementale syrienne mandatée par le gouvernement de Damas, sous la direction du général de brigade Qasseem Suleiman a rejeté la responsabilité des massacres sur une bande de 600 à 700 hommes armés qui auraient pris d'assaut simultanément cinq postes loyalistes (*). Des sources pro-Assad renvoient à une émission de la Chaîne Rossiya 24 que Global Research (dont les contributeurs sont loin d'avoir toujours été crédibles) aurait retranscrite en anglais sur le sujet. Mais il ne s'en trouve pas de trace ailleurs sur le Net. Cette émission reprend la version de la commission de Qasseem Suleiman en donnant des détails sur les 600 à 700 hommes responsables selon elle des meurtres de civils.

 

Le 7 juin Mazraat al Kabir un nouveau massacre d'ampleur comparable a été commis dénoncé par l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH) et le Conseil national syrien (CNS basé à Istanbul) comme provoqué par les mêmes mêmes miliciens (alors pourtant que le village est principalement peuplé de minorités proches du régime et de sunnites loyalistes). Les présomptions de manipulation par l'OSDH et le CNS, directement reprises par les grands médies occidentaux, sont assez sérieuses sur les deux massacres.

 

L'opposition armée a annoncé son désengagement du plan Annan dès l'annonce du massacre d'Houla. Le plan Annan adopté le 4 mai dernier qui prônait l'arrêt des violences du côté des rebelles comme des forces gouvernementales (une symétrie entre les Occidentaux refusaient jusque là) et le retrait des armements lourds. Ce plan a régulièrement été torpillé depuis un mois tant par les forces gouvernementales que par les rebelles.

 

Selon le  New York Times, les Etats-Unis ont préparé un plan de sortie de crise, qui prévoirait le départ de Bachar el-Assad - plan calqué sur celui qui a mis fin en février 2012 à la présidence d’Ali Abdallah Saleh au Yémen (c'est-à-dire avec une impunité pour lui et ses proches), mais la Russie s'en tient au soutien au plan Annan qu'elle veut faire cautionner à une conférence internationale, et estime que le départ d'Assad ne peut que provenir d'une décision du peuple syrien sans ingérences étrangère. Mais les chances de succès de cette conférence, qui ne substituera pas en tout état de cause au Conseil de Sécurité de l'ONU, sont faibles, des controverses apparaissant déjà autour de la présence de l'Iran en son sein.

 

A défaut d'obtenir le feu vert de la Russie pour une intervention militaire à la libyenne en Syrie qui leur permettrait d'affaiblir l'axe chiite pro-iranien au Proche-Orient, les Occidentaux et les pétro-monarchies semblent résolus à jouer la carte de l'échec du plan Annan et du développement de la guerre civile ("conflit de basse intensité") dans ce pays, une guerre civile dont la population paie un prix très élevé. Par exemple, l'agence de presse du Vatican Agenzia Fides le 4 juin citait ce témoignage de Mgr Philippe Tournyol du Clos Archimandrite Grec-Catholique Melkite, ancien membre de la Fraternité Saint Pierre (traditionnaliste): "[A Homs] Le spectacle qui s’offre maintenant à nos yeux est celui de la plus absolue désolation : l’église de Mar Élian est à demi détruite et Notre-Dame de la Paix saccagée (près de laquelle on a trouvé plusieurs personnes égorgées) est encore occupée par les rebelles. Les maisons, très endommagées par les combats de rue sont entièrement vidées de leurs habitants qui ont fui sans rien emporter ; le quartier d’Hamidieh constitue encore aujourd’hui le refuge inexpugnable de bandes armées indépendantes les unes des autres, fournies en armes lourdes et en subsides par le Qatar et l’Arabie Saoudite. Tous les chrétiens (138’000) ont pris la fuite jusqu’à Damas ou au Liban ; ceux qui n’y avaient pas de parents se sont réfugiés dans les campagnes avoisinantes, chez des amis, dans des couvents, jusqu’au Krak des Chevaliers. Un prêtre y a été tué ; un autre, blessé de trois balles dans l’abdomen, y vit encore ainsi qu’un ou deux autres, mais ses cinq évêques se sont prudemment réfugiés à Damas ou au Liban"

 

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(*) Le rapport des autorités signale aussi que font partie des victimes l'épouse d'Abdulmuti Michib (deuxième secrétaire de l'assemblée nationale syrienne récemment élu) et ses enfants, son frère et sa famille entière, ainsi qu'un proche de cette épouse Mu'aweyah As-sayed, officier du centre de police du Houla ainsi que toute sa famille.

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13 mars 2012 2 13 /03 /mars /2012 14:09

drones.jpgLe 9 mars dernier, l'aviation israélienne a assassiné à Gaza Zouheir al-Qaïssi secrétaire général des Comités de résistance populaire (comme elle avait tué son prédecesseur) et  Ahmad al-Khanini, haut responsable de cette organisation récemment libéré lors de l'échange de prisonniers contre Shalit. (Rappelons que de 12002 à 2008, 387 Palestiniens ont été ainsi tué dans des assassinats ciblés selon une étude du rapporteur spécial de l'ONU sur les exécutions extrajudiciaires Philip Alston de 2010 qui essaie de poser des critères de nature à limiter cette pratique).

 

Les Comités de résistance populaire et le Djihad islamique (mais pas le Hamas) ont répliqué par l'envoi de 200 roquettes sur Israël. Selon Asia Times Online qui reprend les chiffres gouvernementaux israéliens 85 % ont été arrêtées par le système "Dome de Fer" (Iron Dome), un bouclier anti-missile de 200 millions de dollars livré par l'administration Obama. (L'agence russe Ria Novosti, elle, retient elle le chiffre de 35 % sur 120 roquettes envoyées, mais aucun autre média n'a retenu ce chiffre qui semble faux). De sorte qu'aucun civil israélien n'a perdu la vie. En revanche 21 à 25 Palestiniens ont été tués par des drones israéliens en représaille dont 6 civils y compris 2 enfants.

 

L'association propalestinienne Europalestine parle en outre de 80 blessés (chiffre corroboré par d'autres sources), et rappelle aussi au passage la poursuite de violences en Cisjordanie le weekend dernier (80 oliviers déracinés, raids de nuit et incursions au domicile de Palestiniens dans 19 camps de réfugiés, villes et villages palestiniens, arrestations brutales de 15 Palestiniens)

 

Le premier ministre israélien a menacé de passer à l'offensive terrestre. Pour l'heure un accord de cessez-le-feu a été signé mais son respect reste incertain.

 

Dans la presse israélien, Haaretz tente de faire porter la responsabilité de l'activisme des tireurs de roquettes à l'Iran et à la Syrie, protecteurs du Djihad islamique. Il laisse entendre que le secrétaire général du Djihad islamique Ramadan Shallah toujours basé à Damas (et protégé par Bachar El-Assad) pourrait inciter ses partisans à poursuivre les lancements de roquettes pour accroître la visibilité de son mouvement face à un Hamas accusé de renoncer à la résistance, et paralysé en ce moment entre sa dépendance contradictoire à l'égard de l'Iran (qui achemine l'aide économique mais aussi humanitaire à Gaza), de la Syrie (qui l'héberge) et des pétromonarchies du Golfe.

 

Les partis proches des Frères musulmans dans les pays où ils sont majoritaires ont réagi vivement. Ainsi le gouvernement tunisien  a "dénoncé la nature hostile de l'entité sioniste", il condamne les crimes contre les civils et "exhorte l'Organisation des Nations Unies à prendre conscience de l'ampleur des dangers qui guettent la région" Lundi l'Assemblée populaire égyptienne (Chambre basse du Parlement) a appelé d'un commun accord à l'expulsion de l'ambassadeur d'Israël au Caire en raison de la poursuite des raids aériens sur la bande de Gaza. Les députés ont par ailleurs demandé au gouvernement de cesser immédiatement les exportations de gaz vers Israël en raison des violations des droits de l'Homme commises par Israël dans son agression des civils palestiniens. Des manifestations de solidarité avec Gaza ont eu lieu dans le Sinaï.

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5 mars 2012 1 05 /03 /mars /2012 13:50

usmarine.jpgLe 2 mars dernier un "officier de la CIA" aurait été tué lors d'une attaque dans la province d'Aden par le groupe Ansar al-Charia. Ansar al-Charia (les "supporters de la charia") est un groupe nouveau, dont on ignore s'il est distinct d'Al Qaida, qui controle dans le sud Shawa et Abyan, et fournit dans ces zones une aide importante aux pauvres tout en imposant une version dure de la loi islamique. Le Pentagone a reconnu qu'une "équipe de sécurité" américaine a été la cible de tirs, ce qui pose la question d'une présence militaire américaine cachée, alors qu'Obama a toujours démenti toute intention d'envoyer des troupes dans ce pays.

 

La nouvelle intervient alors que les Etats-Unis et leurs alliés saoudiens et qatariens poursuivent leur bras de fer avec le mouvement populaire yéménite.

 

Le 27 février dernier, après un an de manifestations populaires (et d'une répression qui a fait plus de 2 000 morts), le président sortant Ali Abdallah Saleh a démissionné, en application d'un accord signé avec ses voisins et alliés, les pétromonarchies du Golfe, du 23 novembre dernier, en échange du maintien de son impunité judiciaire. Une transition en douceur bien différente de celle que l'OTAN a imposée en Libye. Tandis que les Occidentaux s'indignaient de voir Bachar-El-Assad organiser un référendum constitutionnel en Syrie, ils faisaient avaliser par le peuple sur un mode plébiscitaire l'élection à la présidence du Yémen pour deux ans d'Abd Rabbo Mansour Hadi, un officier originaire du Sud formé par les britanniques et qui a été le vice-président de Saleh depuis 1994 Abd Rabbo Mansour Hadi - il a été élu avec 99,8 % des voix, et une participation de 65 % (officiellement).

 

Les Etats-Unis, qui ont reproché à Saleh de laisser Al-Qaida et Ansar-al-Charia gagner du terrain dans le Sud et l'Est pour se donner le rôle du défenseur de l'unité menacée du pays, espèrent ainsi orchestrer une remise en ordre du pays.

 

Mais le peuple yéménite ne l'entend pas forcément de cette oreille. Les séparatistes du Yémen du Sud (ancienne république communiste qui a rejoint son voisin du Nord il y a vingt ans) et les rebelles chiites Zaidi (Houthis) du Nord ont boycotté le scrutin. Et le peuple à Sanaa lui-même continue de protester contre le fait que les forces de sécurité restent entre les mains des fils et neveux de Saleh.

 

Selon la TV iranienne le 1er mars 2012, des soldats sont descendus dans la rue pour demander la démission du brigadier-général Hussein Khairan et du commandant de l'aviation Mohammed Salah al-Ahmar (le demi-frère de Saleh) accusés de corruption. Les manifestants scnadaient aussi des slogans anti américains et antisaoudiens. Une dépêche occidentale confirme la manifestation qui réunissait 500 soldats, mais fait l'impasse sur les slogans anti-occidentaux que la presse iranienne rapporte.

 

Selon l'expert panafricaniste Abayomi Azikiwe, le gouvernement américain va désormais payer directement les militaires yéménites pour contourner la corruption des généraux ce qui est une étape supplémentaire dans le processus d'ingérence.

 

Les soldats ne sont pas les seuls à manifester. Le 29 février, photographies à l'appui, la TV iranienne faisait état de manifestations à Sanaa brûlant le drapeau américain l'éphigie de l'ambassadeur Gerald Michael Feierstein  et exigeant son départ. En décembre Feierstein, qui se comporte en proconsul au Yémen, comme l'avait fait Anne Patterson au Pakistan, s'était déjà attiré les foudres du peuple en qualifiant de "non pacifique" une marche populaire entre Taiz et Sanaa. Une manifestation anti-américaine se serait aussi déroulée à Taiz ville-martyr au Sud-Ouest du pays, qui est le coeur de la révolution yéménite. Le nombre de participants n'est pas connu. Par ailleurs juste avant les élections un millier d'employés du pétrole de Petro Masila s'étaient mis en grève bloquant la production dans l'Hadhramout (Sud-Est) - mais l'activité a repris le 29.

 

Les Etats-Unis se heurtent à un véritable casse-tête au Yémen aussi bien pour neutraliser les mouvements populaires non-violents que pour liquider les guérillas. Leur volonté de miser sur les ONG financées par USAID a échoué car aucun expert occidental ou pro-occidental n'accepte de se rendre au Yémen. Donc aucun programme de "smart power" ne fonctionne. Sur le plan militaire la seule alternative à l'intervention au sol est l'envoi de drones, une spécialité américaine désormais, mais qui, comme au Pakistan, tue beaucoup de civils innocents et ne fait qu'accroître l'hostilité à Washington dans ce pays.

 

Pour mémoire au Yémen la moitié de la population vit avec moins de 2 dollars par jour.

 

F. Delorca

 

------ Cet article est également publié sur Actualutte.info

 

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5 mars 2012 1 05 /03 /mars /2012 10:47

syrie.png Le 24 février s'est tenue à Tunis la conférence des "Amis de la Syrie" réunissant 70 pays, y compris l'Inde, qui a décidé d'y assister après avoir reçu une aide pétrolière de Riyad, mais en l'absence de la Russie et de la Chine. Le groupe a reconnu le Conseil national syrien (CNS) comme "un représentant légitime des Syriens qui cherchent un changement démocratique pacifique". Il s'est engagé à fournir "un soutien effectif" à l'opposition, sans plus de précisions et prôné l'instauration de couloirs humanitaire vers Homs pilonnée par l'armée syrienne.

 

Parallèlement à cette réunion, selon le Canard enchaîné du 29 février des représentants des services de renseignements américains, britanniques, français, turcs, saoudiens et qataris ont participé à  une réunion secrète pour préparer un coup d'Etat à Damas pour lequel un budget serait prévu, avec une forte mobilisation des services français, sans garantie toutefois de pouvoir rallier des hauts gradés syriens à ce projet.  

 

De leur côté, les partisans du régime syrien affichent leur optimisme. Le 14 février un article de la  Komsmolskaia Pravda égrainait une série de nouvelles triomphalistes : "Le 7 février, une importante délégation russe, incluant les plus hauts responsables du renseignement extérieur, est arrivée à Damas où elle a été accueillie par une foule en liesse (...)Une série d’accords a été conclue pour le retour à la paix. La Syrie a restitué 49 instructeurs militaires faits prisonniers par l’armée syrienne. La Turquie est intervenue pour faire libérer les ingénieurs et les pèlerins iraniens enlevés, y compris ceux qui étaient détenus par les Français (au passage, le lieutenant Tlass qui les séquestrait pour le compte de la DGSE a été liquidé). La Turquie a cessé tout soutien à l’ « Armée syrienne libre », a fermé ses installations (hormis celle située sur la base de l’OTAN à Incirlik), et a livré son chef, le colonel Riad el-Assad. La Russie, qui s’est portée garante des accords, a été autorisée à réactiver l’ancienne base soviétique d’interception du mont Qassioum." Puis "les armées nationales non seulement de la Syrie, mais aussi du Liban, ont donné l’assaut des bases de la Légion wahhabite. Au Nord du Liban, un gigantesque arsenal a été saisi à Tripoli et quatre officiers occidentaux ont été faits prisonniers dans le Akkar dans une école désaffectée de l’UNRWA transformée en QG militaire. En Syrie, le général Assef Chawkat en personne a commandé les opérations. Au moins 1 500 combattants ont été faits prisonniers, dont un colonel français du service technique de communication de la DGSE, et plus d’un millier de personnes ont été tuées."

 

Ces informations ne sont pas toutes fiables. Ainsi par exemple celle selon laquelle le colonel Riad El-Assad a été livré par la Turquie est directement démentie par la dépêche publiée par  Le Point quinze jours plus tard qui interviewe ledit colonel... Toutefois l'embarras des Occidentaux et leurs hésitations à suivre les wahabites saoudiens et qatariens dans leurs projets d'intervention en Syrie sont sensibles depuis la réunion de Tunis. Il ne semble pas y avoir de stratégie de rechange sérieuse après la position ferme adoptée par les Russes et les Chinois.

 

Par ailleurs, divers éléments confirment que le soutien militaire des pétromonarchies et des Occidentaux à l'opposition syrienne armée ne fait pas l'unanimité au Proche-Orient y compris même parmi les alliés potentiels des opposants à Bachar El-Assad. Ainsi dans l'Ouest de l'Irak, alors qu'Al Qaida a appelé au Djihad en Syrie, les chefs tribaux sunnites hostiles au gouvernement de Damas sont beaucoup plus modérés. Al Arabiya aujourd'hui cite les cheikhs Khaled Khalifa, Hnein, et Ali Ayed qui tous soulignent que l'aide à la guérilla nuira au peuple syrien et que les pétromonarchies devraient plutôt exercer des pressions politiques sur le régime syrien. Au Liban, le Quotidien  L'Orient-le-Jour cite aujourd'hui les propos du chef de l'église maronnite Mgr Béchara Raï. Celui-ci, qui se défend de soutenir le régime syrien, mais condamne le soutien à la rébellion armée. « La Syrie, comme d’autres pays, a besoin des réformes que le peuple réclame et que même son président, Bachar el-Assad, avait annoncées depuis mars dernier », estime-t-il. « Il est vrai que le régime du Baas est une dictature, mais il en existe plusieurs sur son modèle dans le monde arabe », a-t-il poursuivi en enchaînant : « Dans tous les pays arabes, la religion de l’État est l’islam, sauf en Syrie où l’on indique seulement que le président doit être musulman sans considérer l’État comme étant islamique. » « La Syrie est la plus proche d’une démocratie » ajoute-t-il en faisant référence à la liberté religieuse qui y règne. Faisant état de « plans destructeurs établis dans le cadre des politiques internationales », Mgr Raï estime que ce sont « des États et non pas les peuples qui soutiennent financièrement, militairement et politiquement les mouvements intégristes ». Le patriarche maronite libanais est certes accusé par certains sites de dépendre de Damas mais sa position, comme celle du général Aoun, traduit pour le moins une division des chrétiens libanais sur le dossier syrien (alors que ceux-ci sont traditionnellement proches des positions occidentales).

 

Pendant ce temps les combats contre les déserteurs de l'Armée de Libération syrienne se poursuivent à Homs et Rastane.

 

Pour mieux comprendre la situation syrienne, on peut se reporter au rapport d'une mission organisée par le Centre international de recherche et d’études sur le terrorisme et d’aide aux victimes du terrorisme (CIRET-AVT) et le Centre Français de Recherche sur le Renseignement (CF2R) présenté lors d'une conférence de presse à Paris le 10 février dernier (devant des médias arabes notamment, mais L'Humanité était le seul médias français à y assister). Ce rapport, tout en étant sans concession à l'égard du régime répressif syrien, montre clairement les enjeux géopolitiques extérieurs qui se sont greffés sur le cas syrien (notamment l'ingérence des Occidentaux et des pétromonarchie), venant compromettre sciemment les chances d'une démocratisation pacifique du pays. Il est en ligne ici.

 


 

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17 février 2012 5 17 /02 /février /2012 11:02

Cette semaine offre aux Occidentaux une source de satisfaction et un motif d'inquiétude au Proche-Orient.

 

syrie.pngHier l'Assemblée générale des Nations-Unies a adopté par 142 voix pour (et non 137 comme initialement annoncé soit 9 de plus que lors d'un vote similaire en décembre dernier), et 12 abstentions (au lieu de 17 annoncées initialement) une résolution condamnant la répression menée par le régime de damas. La Russie, la Chine, le Venezuela (actuellement menacé de sanctions pour avoir livré du diesel à Damas), l'Equateur, le Cambodge, la Bolivie, le Nicaragua, Cuba, l'Iran, le Zimbabwe, la Corée du Nord et la Syrie. La Chine a fait savoir qu'elle condamnait la répression et appuyait les aspirations du peuple syrien mais qu'elle souhaitait une évolution dans le respect de la loi et expliquait son vote par le refus d'une politique de "changement de régime" (regime change) dictée de l'extérieur.  La Russie a dénoncé un document "non-équilibré". L'Algérie, l'Arménie, l'Angola, le Liban, la Tanzanie, le Surinam, les Fidji, le Vietnam, l'Ouganda, le Cameroun, le Népal se sont abstenus (d'après ArabSaga et sous réserve des dernières révisions de vote). Certains pays qui ont voté pour la résolution ont fait savoir que ce vote ne devait pas servir de base à une action militaire - telle fut par exemple la position de la Grenade. L'Inde, qui s'était attirée des critiques en s'abstenant sur la Syrie au comité des droits de l'homme de l'ONU en novembre, a voté pour la résolution cette fois-ci (il n'y a donc plus d'unité des BRICS sur ce dossier), de même que l'Argentine, l'Afrique du Sud et le Brésil qui pourtant défendent souvent le non alignement. Le représentant indien comme celui de la Grenade s'est cependant déclaré hostile à une ingérence extérieure. Le vote "pour " de certains pays  attire l'attention : la Serbie (pourtant en délicatesse avec les Occidentaux sur le Kosovo), l'Azerbaïdjan (allié important des Occidentaux en cas de guerre contre l'iran), le Myanmar (qui scelle ainsi sa nouvelle alliance avec les USA), le Kirghizstan (pays peu démocratique mais important pour l'OTAN en Asie centrale), le Soudan, le Sri Lanka (lui aussi exposé à des ingérences sur son processus de réconciliation nationale, et qui avait été initialement compté comme abstentionniste) et même l'Irak (réputé proche de Téhéran et qui soutenait la Syrie l'an dernier).

 

Parallèlement le Parlement européen votait une résolution demandant le gel des relations des 27 avec Damas et l'arrêt des livraisons militaires russes à Bachar El-Assad, mais résistait aux options maximalistes comme celle de l'eurodéputée socialiste belge Véronique de Keyser qui demandait l'instauration d'une zone d'exclusion aérienne comme en Libye (dispositif militaire qui avait permis le soutien des bombardiers de l'OTAN aux milices de Misrata et Benghazi).

 

La France a annoncé son intention de créer un fonds d'urgence humanitaire pour la Syrie doté d'un montant d'un million d'euros, après une rencontre avec des ONG impliquées dans ce pays et prépare avec la Ligue arabe dirigée par le Qatar un projet de résolution au conseil de sécurité de l'ONU impliquant la création de corridors humanitaires. La France a aussi favorisé la mise en place d'un groupe "d'amis de la Syrie" qui se réunira en Tunisie le 24 février (la Syrie a expulsé récemment l'ambassadeur de Tunisie) et se rapproche à nouveau du Royaume-Uni (après quelques semaines de tension), un rapprochement qui pourrait avoir des prolongerments militaires opérationnels en cas d'intervention directe.

 

Le gouvernement syrien qui continue la répression des milices armées à Homs, Hama, Deraa, a procédé à l'arrestation d'un journaliste et d'une blogueuse hier. Il a par ailleurs annoncé la tenue d'un référendum le 26 février sur une réforme constitutionnelle qui abrogera le rôle dirigeant du parti Baas dans l'Etat et dans la société et limitera le mandat présidentiel à deux septennats. Le Comité de coordination pour le changement national et démocratique (opposition de l'intérieur) a appelé au boycott du référendum.

 

flag_egypt.pngSi les Occidentaux ont remporté un succès diplomatique à l'ONU, leur situation se complique en Egypte. Comme nous l'avions indiqué début janvier, fin décembre 17 locaux d'ONG égyptiennes et internationales de défense des droits et de promotion de la démocratie avaient été perquisitionnés au Caire.  44 personnes, dont 19 Américains (dont le fils du ministre des transports américain) et d'autres étrangers, accusées de financement illégal d'organisations non gouvernementales ont été arrêtées. Les Etats-Unis ont haussé le ton en menaçant l'Egypte de couper l'aide militaire si ces personnes n'étaient pas relâchées, mais contre toute attente, les Frères musulmans égyptiens, avec lesquels le démocrate John Kerry avait pourtant pris contact en décembre, font bloc aujourd'hui avec le conseil militaire de transition sur ce dossier. Hier 16 février, Essam El-Erian, nouveau président de la commission des affaires étrangères de la Chambre du Peuple et vice-président du Parti de la liberté et de la justice (Frères musulmans), a déclaré à une agence de presse occidentale que l'aide militaire américaine faisait partie des accords de paix de Camp David signés en 1979 avec Israël.

 

Les membres du Congrès des Etats-Unis de leur côté ont multiplié les menaces ces derniers jours, le représentant démocrate Gary Ackerman disant même que Washington et le Caire "étaient en train d'approcher du précipice au delà duquel nos relations bilatérales pourraient subir un dommage définitif". "Si les gens ici [aux Etats-Unis] concluent que l'Egypte n'est pas sur le chemin de la démocratie, mais qu'elle est au contraire en voie de devenir un autre Iran, nos relations bilatérales n'y survivront pas, a-t-il ajouté. Nous n'en sommes pas encore à ce point, mais nous nous en rapprochons chaque jour".

 

Selon un récent sondage 70 % des Egyptiens ne veulent pas de l'aide économique et militaire américaine. Mercredi un important prédicateur salafiste égyptien a demandé que l'aide américaine soit remplacée par des dons des citoyens. Le même jour Rashad Bayoumi, autre haut responsable des Frères musulmans, a déclaré que l'aide américaine étaot une "chaine qui limite la liberté " de l'Egypte, la qualifiant d' "aide humiliante" et il a critiqué l'ambassadrice américaine Anne Patterson rappelant qu'elle avait eu un passé douteux ("questionable") au Pakistan et l'accusant d'avoir été nommée en Egypte au mois d'août dernier pour y développer les mêmes méthodes. Il reprenait les accusations du prédicateur Mazhar Shaeen formulées en septembre 2011 selon lesquelles Mme Patterson aurait favorisé la "sédition" au Pakistan (en 2010 Wikileaks avait révélé les intrigues de l'ambassadrice américaine à Islamabad).

 

L'Egypte et le Pakistan qui sont avec l'Indonésie parmi les trois plus grandes puissances musulmanes alliées des Etats-Unis sont en ce moment en froid avec ce pays. En Egypte le débat sur l'aide américaine fait sauter un tabou. Ses conséquences sont désormais imprévisibles.

 

 


 

 

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5 janvier 2012 4 05 /01 /janvier /2012 11:07

jeu_dames.jpgLe  New-York Times du 3 janvier 2012 titrait "Les ouvertures aux islamistes égyptiens inversent la politique de long terme des Etats-Unis" (Overtures to Egypt's Islamists Reverse Longtime US Policy). L'article de David D. Kirpatrick et Steven Lee Myers souligne que Washington désormais s'accommode des Frères musulmans en Egypte depuis que ceux-ci se sont engagés à respecter les règles démocratiques, le libéralisme économique et les traités avec Israël, tandis qu'ils accumulent les frustrations à l'égard du régime militaire qu'ils accusent de vouloir confisquer le pouvoir.

 

Récemment John Kerry, ex candidat aux présidentielles face à Bush, et aujourd'hui président de la commission des affaires étrangères du Sénat et l'ambassadrice Anne W. Patterson ont rencontré trois hauts responsables du Parti de la justice et de la liberté (Frères musulmans) égyptien, Essam El-Erian, Mohamed Saad Katani et Mohamed Morsi à Washington le 10 décembre dernier. Selon l'administration Obama il s'agirait là d'une nouvelle forme de Realpolitik comme lorsque Reagan a engagé des négociations avec l'URSS sur la course aux armements. Ce renversement d'alliance s'est d'ailleurs illustré lundi dernier lorsque les Etats-Unis ont adressé un ultimatum au gouvernement militaire au sujet des perquisitions chez les ONG pro-occidentales.

 

En réalité le chemin pour le rapprochement avec les Frères musulmans égyptiens avait été balisé dès le mois de février par le directeur du Renseignement national (National Intelligence) James Clapper, qui, devant la Commission du renseignement de la chambre des représentants, avait présenté les Frères musulmans comme un "groupe hétérogène", "largement laïque", et qui refusait la violence.

 

Les convergences entre les Frères musulmans et les intérêts américains ne se limitent pas à l'Egypte puisque Washington comme les islamistes ont eu un intérêt commun au renversement du régime de Kadhafi en 2011 et des régimes relativement laïcs d'Algérie et de Syrie aujourd'hui.

 

Selon certains analystes, la nouvelle stratégie américaine intègrerait même une alliance ponctuelle avec des islamistes sunnites plus radicaux de la mouvance Al-Qaida, qui ont été actifs dans la guerre de Libye (avec notamment le gouverneur militaire de Tripoli Abdelhakim Belhaj et le guide spirituel cheikh Ali Al-Salibi) et aujourd'hui dans l'encadrement de l'Armée syrienne libre (selon le reportage de Daniel Iriarte dans le quotidien espagnol ABC du 17 décembre 2011, deux lieutenants d'Abdelhakim Belhaj dirigeraient cette structure).

 

Un opérateur de l'alliance entre les Etats-Unis et les Frères musulmans est l'émirat du Qatar. En 2011 ce pays a financé les rebelles libyens de Benghazi, fait passer la motion de la Ligue arabe pour les soutenir, fourni de la logistique depuis les talkie-walkie jusqu'aux Chevrolet SUV, puis des missiles anti-tank français Milan, entraîné des miliciens (encore aujourd'hui il existe un programme d'entraînement de soldats libyens en France financé par le Qatar), lancé une chaîne TV anti-Kadhafi Libya al-Ahrar. Le Qatar aujourd'hui exerce une influence perçue comme de plus en plus encombrante sur le gouvernement libyen (voir Time Magazine du 2 janvier), et pourtant l'émirat ne s'arrête pas là. En Algérie, il finance la chaîne de TV d'Oussama Madani, un des fils de Abassi Madani, ancien président du Front islamique du Salut. En Syrie il a fait passer la motion suspendant le gouvernement de Bachar El Assad de la Ligue arabe et aujourd'hui son premier-ministre cherche à discréditer les témoignages des observateurs de la Ligue arabe à Damas parce que ceux-ci ont relevé que le gouvernement syrien était confronté à des groupes armés. Selon le site Debkafiles du 27 décembre, le Qatar a monté de toute pièce en accord avec l'Arabie saoudite une force mobile d'intervention de 2 5000 hommes dont la moitié est composée de combattants du Groupe combattant islamique en Libye (Islamic Fighting Group in Libya-IFG) et des terroristes du Ansar al-Sunna irakien (responsable d'attentats sanglants), les a convoyés de l'Irak et de Libye jusqu'en Turquie pour suivre un entraînement militaire, et assure la logistique de leurs infrastructures de communication, avec la complicité de l'OTAN.

 

Le Qatar est d'aileurs de plus en plus imbriqué dans les structures militaires et civiles occidentales. Le fonds souverain qatarien Qatar Holding multiplie les prises de participation dans le capital des grandes entreprises européennes- Hochtief, Volkswagen, Iberdrola, Veolia, ou encore Vinci. Il a porté en décembre sa part d'actions de 7,6 à 10,07% dans le capital du fabricant d'armes français Lagardère (qui contrôle aussi les grands médias de l'hexagone) et lorgnerait vers EADS (voir L'Expansion du 3 janvier 2012)

 

Mais la nouvelle politique pro-islamiste d'Obama, qui correspond à la tradition démocrate (Jimmy Carter a aidé les islamistes en Afghanistan, Bill Clinton en Bosnie-Herzégovine) heurte les Républicains adeptes du choc des civilisations et leurs alliés en Europe et en Israël.

 

Divers blogs républicains ont rappelé que les Frères musulmans continuent de vouloir appliquer la charia et à ce titre ne méritent pas d'être taxés de laïques (secular). Les Républicains reprochent aussi à Hillary Clinton d'avoir reçu, du 12 au 15 décembre, à huis clos à Washington des représentants de l'Organisation de la conférence islamique (OCI) pour discuter de la mise en oeuvre la résolution 16/18 du Conseil des droits de l'homme de l'ONU relative à la lutte contre l'intolérance, la stigmatisation, la discrimination et la violence à l'encontre des personnes sur la base de leur religion ou de leur croyance. Selon eux, le vote de la résolution en mars dernier avait permis de préserver la notion de liberté d'expression, ce que risque de menacer le droit de regard que Mme Clinton accorde à l'OCI au niveau de la mise en oeuvre. 

 

En Europe José Maria Aznar, ancien Premier ministre espagnol et allié important de George W. Bush pendant la guerre d'Irak, invité du blog de CNBCa révélé le 9 décembre 2011 qu’Abdelhakim Belhaj était un des suspects dans les attentats du 11 mars 2004 à Madrid. L'ex-ambassadeur israélien Dore Gold président du Jerusalem Center for Public Affairs a complaisamment relayé l'information dans le Jerusalem Post tout en mettant en garde le public américain contre le fait que les Frères musulmans pourraient un jour s'allier à l'Iran si elle venait à prendre le leadership du Proche-Orient, comme l'avait fait le gouvernement lié aux Frères musulmans du Soudan dans les années 1990.

 

L'alliance entre Obama et les Frères Musulmans (voire avec certaines tendances d'Al Qaida), dans une relation triangulaire avec les pétro-monarchies est aussi de nature à inquiéter l'Iran et ses alliés du Hezbollah libanais, car nul doute que la force mobile créée par les Qatariens si elle parvenait à s'implanter en Syrie serait aussi d'une grande utilité contre eux. La carte du choc des civilisations chrétiens/musulmans tend ainsi à se transformer dans l'esprit des stratèges en choc chiites/sunnites...

 

La version audio de ce billet (Radio M) :

 

 

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3 janvier 2012 2 03 /01 /janvier /2012 17:16

flag_egypt.pngDimanche lors d'une conférence de presse les ministres égyptiens du Plan et de la Coopération internationale Fayza Aboul Naga et de la Justice Adel Abdel Hamid Abdallah ont présenté le point de vue officiel après les protestations internationales contre les perquisitions de locaux de 17 ONG, dont trois américaines (le National Democratic Institute, l'International Republican Institute et Freedom House ) et une allemande (la fondation Konrad Adenauer). Ces associations sont accusées de ne pas avoir obtenu les autorisations nécessaires pour exercer leur activité et recevoir des financements étrangers. Les ministres ont insisté sur le fait que c'est la Justice égyptienne qui a été à l'origine de ce actions.

 

Le lundi 2 janvier les Etats-Unis ont sommé sans ménagement le gouvernement militaire égyptien de mettre fin aux perquisitions budgétaires et restituer aux ONG les documents confisqués. En arrière plan de cet avertissement, la campagne de certains sénateurs pour la suspension de l'aide (1,3 milliards de dollars par an) versée par les Etats-Unis depuis les accords de Camp David.

 

Dans le journal Al-Gomhuria le 2 janvier, le rédacteur adjoint d'Al Arabiya.net Farrag Ismail, s'indignait du manque de respect pour la souveraineté de la justice égyptienne que constituait le ton de l'avertissement lancé par le secrétaire à la Défense Leon Panetta au maréchal Mohamed Hussein Tantaoui (le numéro un du nouveau régime égyptien).

 

Les défenseurs des ONG eux soutiennent que celles-ci se sont bornées à faire de la surveillance électorale sans participer à la campagne et accusent la ministre Faiza Aboul Naga, qui appartenait aux gouvernements antérieurs de Moubarak, de jouer un rôle clé dans l'action anti-ONG tandis que des groupes salafistes eux-mêmes financés par l'étrager ne seraient pas inquiétés. Les attaques contre Faiza Aboul Naga ne sont toutefois pas claires. Certes celle-ci a fait parti du comité politique du Parti national démocratique présidé par Gamal Moubarak le fils du dictateur, mais cette ancienne conseillère de Boutros Ghali à l'ONU, diplomate de carrière, qui cite Arafat, Bouteflika, Mandela et Castro parmi ses modèles semble avoir une sensibilité ouverte au non-alignement, et en octobre dernier ses adversaires du Réseau arabe pour l'Information  sur les droits de l'homme à l'inverse l'accusaient au contraire de vouloir "saboter la société civile" (c'est-à-dire les associations non financées par USAID) en collaboration avec l'ambassade des Etats-Unis. Quant au rôle des ONG mentionnées, il n'est pas si anodin qu'il n'y paraît. Un article du présent blog le 6 octobre dernier avait par exemple souligné l'action politique de la fondation Konrad Adenauer aux côtés d'USAID pour soutenir la Ligue pour la Défense de l'Environnement en Bolivie.

 

Le blogueur américain de gauche David Swanson interviewé par Russia TV commentait quant à lui en ces termes le rôle des ONG : "Nous parlons ici au sujet de beaucoup d'O.N.G.s qui ont différents ordres du jour, certaines parmi les ONG américaines ont des liens avérés avecla CIA et ont tenté d'influencer les résultats des élections dans d'autres pays." "Ce ne sont pas des groupes à travers lesquels les étrangers armés de bonnes intentions peuvent essayer d'aider le peuple de l'Egypte. C'est au peuple de l'Egypte qu'il appartient d'établir une société civile de haut niveau dans son propre pays" a-t-il conclu.

 

L'Egypte, actuellement engagée dans un processus électoral complexe qui devrait déboucher sur la rédaction d'une nouvelle constitution et l'élection d'un président de la République en juin, est dans une position très vulnérable à l'égard de ses mentors occidentaux alors que le pays s'enlise dans le marasme économique. En juin dernier le gouvernement militaire avait refusé une avance du FMI de 3 milliards d'euros car il ne souhaitait pas augmenter la dette du pays sans mandat populaire, mais cette ligne ne pourra pas être tenue très longtemps. La visite d'une délégation du FMI a été plusieurs fois repoussée.

 

Delphine Jaen

 

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