
Après que les Etats-Unis aient échoué à démontrer (et pour cause…) que leur dispositif anti-missile en Europe de l’Est n’avait par pour but de neutraliser la force de dissuasion nucléaire russe, le président russe Vladimir Poutine a annoncé que la Russie suspendrait l’application du traité limitant les armes conventionnelles (http://www.washingtonpost.com/wp-dyn/content/article/2007/04/26/AR2007042600430.html?hpid=topnews ). La course aux armements serait donc relancée comme nous l’avions déjà suggéré le 24 février dernier.
Sur le front idéologique, la polémique entre la Russie et l'Estonie enfle depuis l'annonce du démantèlement du Monument des libérateurs de Tallinn, lequel pourrait impliquer le déplacement des cadavres de soldats de l'Armée Rouge enterrés sous le monument. Si de tels démantèlements ont également eu lieu en Russie (à Khimki, et encore sans profanation de sépulture), dans les pays baltes ils s’inscrivent dans un contexte de révisionnisme historique très sensible. En 2004 l'Estonie avait été contrainte de démanteler un monument dédié aux combattants antisoviétiques et représentant un soldat en uniforme SS, érigé à Lihula, dans l'ouest du pays, à l'initiative de la commune (http://www.liberation.fr/actualite/monde/238722.FR.php ).
Dans l’ensemble de l’Europe de l’Est alors que les initiatives anticommunistes se développent en Ukraine (http://english.communist.ru/2007/04/24/in-ukraine-the-trial-over-communism-will-be-held.htm) et en Pologne (ce qui a ému l’opinion publique occidentale du fait qu’elles touchent d’anciens membres de Solidarinosc – cf AFP 27 avril 2007), le tabou anti-nazi, lui, est de plus en plus fragilisé, comme l’a montré l’affaire des morceaux de sucre à l’effigie d’Hitler vendus en Croatie en février dernier (http://strange.blosker.com/link/croatia-probes-why-hitler-image-on-sugar-packets-7475)
La justice américaine vient de libérer sous caution l'ex-agent de la CIA Luis Posada Carrilles, terroriste inculpé au Venezuela pour avoir organisé un attentat contre un avion de ligne cubain en 1976 (73 personnes morts) et divers autres crimes comme une tentative d’assassinat de Fidel Castro à l’Université de Panama en 2000. Il avait fui Caracas en 2005 pour échapper aux poursuites.
De nombreuses voix s’élèvent dans le monde pour condamner le double langage de Washington en matière de terrorisme. Une pétition circule pour obtenir le jugement de Posada Carrilles signée par l’écrivaine Rigoberta Menchú, la romancière sud-africaine Nadine Gordimer, le dramaturge britannique Harold Pinter, le physicien russe Zhores Alfiorov ( tous les quatre Prix Nobel), et des figures connues comme Noam Chomsky, Naomi Klein, Manu Chao (http://www.porlajusticia.cu/).
Offensive pro-israëlienne en Espagne : plusieurs élus du parti socialiste "ouvrier" espagnol figurent parmi les 237 signataires du manifeste publié par l’Association Solidarité Espagne-Israël (ASEI) qui dénonce le « silence lourd » de la gauche espagnole dans la défense d’Israêl. Le document dénonce le discours « confus » , « antisémite, antijuif et anti-israëlien » qui, «paraît prédominer dans la gauche espagnole ». Le texte qui souligne les qualités d’Israël en termes de valeurs démocratiques, expose que la situation actuelle de l’Espagne (au sein de l’Union européenne) n’aurait pas été possible sans le rétablissement de ses relations diplomatiques avec Israël en 1986 et demande que la droite espagnole ne soit pas la seule à défendre cet Etat. (http://larepublica.es/spip.php?article5164).
Il est vrai que la gauche est assez dynamique dans ce pays sur les questions du Proche-Orient. En ce qui concerne l’Irak, on apprend que la direction du Parti communiste espagnol a annoncé son intention de mobiliser ses juristes pour obtenir la condamnation de José Maria Aznar devant la Cour pénale internationale pour son rôle dans la guerre de 2003, après que l’Audiencia nacional ait classé sans suite une plainte similaire. Tony Blair et George W Bush ont déjà fait l’objet de plaintes devant la cour de La Haye ( http://larepublica.es/spip.php?article5141 ).
A signaler un article intéressant intitulé "La bulle coloniale de la Zone Verte", qui reprend les meilleures pages du livre de Rajiv Chandrasekaran Imperial Life in the Emerald City (Vie impériale dans la ville d’émeraude), sur la "bulle coloniale de la Zone Verte" de Bagdad d'où nous viennent les informations biaisées des grands médias sur la situation en Irak (http://www.alencontre.org/Irak-USA/IrakZoneVerte02_07.htm).
Le même article met par ailleurs en perspective, comme l'avait fait Karim Lakjaa dans l'Atlas alternatif l'an dernier, le budget militaire des Etats-Unis pour 2008 (623 milliards de dollars) en hausse de 62 % depuis 2001 (pas seulement à cause de l'Irak), avec ceux de la Russie (18 milliards de dollars), de la Chine (estimé à 40 milliards), de la France (41 milliards), du Japon (45 milliards), du Royaume-Uni (50 milliards, qui a adopté la semaine dernière une modernisation de son arsenal nucléaire), de l’Inde (22 milliards, en progression sous l'impulsion des USA). Celui de l'Iran, cible actuelle des Etats-Unis, est de 4,5 milliards de dollars.
Aux lecteurs qui comprennent l'espagnol nous conseillons le dossier sur les 4 ans d'occupation de l'Irak constitué par le journal télévisé de 20 h (heure locale) de la télévision vénézuélienne progressiste TeleSUR du 21 mars 2007 (http://www.telesurtv.net/secciones/alamedida/telesurnoticias/index.php).
La dernière série de pourparlers entre représentants serbes et kosovars albanais s’est achevée le 10 mars et, comme prévu, aucun accord n’a été conclu. La « proposition » de résolution du statut du Kosovo de l’émissaire de l’ONU, Martti Ahtisaari, a été acceptée par Pristina, qui y voit le pas décisif vers l’indépendance de la province, et rejetée par Belgrade, refusant l’amputation de 15 % de son territoire.
Car, même si son document ne cite pas le mot « indépendance », c’est bien ce qui est offert par Ahtisaari : le Kosovo se verrait octroyer tous les attributs réservés aux Etats souverains : constitution, hymne, drapeau, droit d’adhérer à des organisations internationales, comme l’ONU, et de créer une armée, bien que devant être « légèrement armée ».
Jusqu’à présent, le processus s’est passé anicroche, ou presque. Géré sous la responsabilité de l’ONU, occupé par une force sous commandement de l’OTAN (KFOR), le Kosovo n’en était pas moins resté, depuis 1999, une partie intégrante de la Serbie, qui a continué à y déployer des structures administratives dans les régions où subsistent des Serbes et d’autres minorités. Pendant ce temps, la majorité albanaise – de plus en plus écrasante en conséquence d’un implacable nettoyage ethnique – attendait avec une impatience croissante la matérialisation des promesses d’indépendance faites par les leaders occidentaux dans la foulée des bombardements de l’OTAN de 1999.
On ne pourra pas reprocher à l’ancien président finlandais d’avoir caché son jeu : déjà, la veille de la première série de « négociations » serbo-albanaises, en février 2006, Ahtisaari avait manifesté toute son impartialité en se prononçant pour l’indépendance du Kosovo dans une interview au Spiegel allemand. Dès lors, ces « négociations » ne pouvaient aboutir au moindre rapprochement entre les parties, la position albanaise – l’indépendance et seulement l’indépendance – étant bétonnée par le « médiateur », lui-même porte-parole des grandes puissances occidentales, tandis que la proposition serbe d’une autonomie maximale n’était jamais prise en compte.
Une première version du « plan Ahtisaari » a été rejetée à la mi-février par le parlement serbe, lors de sa session inaugurale, trois semaines après des élections ayant confirmé la polarisation de l’échiquier politique : le Parti radical, nationaliste, est resté le principal parti de Serbie, mais est condamné à l’opposition face à une probable coalition autour du Parti démocrate, pro-occidental, et Parti démocrate serbe du Premier ministre sortant Kostunica. Jusqu’à présent, la question du Kosovo continue de faire l’unanimité de l’essentiel de la classe politique serbe.
A Pristina, malgré une violente manifestation de partisans de l’indépendance sans négociation, le leadership albanais kosovar a accueilli favorablement le plan Ahtisaari. Sur le plan international, les membres occidentaux du Groupe de contact[1], l’Union européenne, Washington et l’OTAN ont également exprimé leur satisfaction. Seule la Russie manifeste clairement son opposition, arguant que le nouveau statut du Kosovo doit être accepté par les deux parties, Pristina, mais aussi Belgrade.
Légèrement amendée suite à la dernière série de pourparlers entre Belgrade et de Pristina, la proposition d’Ahtisaari vient d’être transmise au Conseil de sécurité de l’ONU. Celui-ci pourrait en discuter en avril, sous présidence britannique, et produire une résolution qui consacrerait l’indépendance du Kosovo et donnerait un nouveau mandat à une présence internationale. Cette étape semble indispensable car une précédente résolution du Conseil, la 1244 ayant mis fin aux bombardements de l’OTAN contre la Yougoslavie en 1999[2], avait non seulement placé le Kosovo sous tutelle de l’ONU et de l’OTAN, mais également consacré la souveraineté serbe sur la province.
Une indépendance très théorique
Telle que prévue, l’indépendance du Kosovo ne changerait pas grand-chose à son statut de protectorat, à court terme du moins. En effet, la tutelle de l’ONU passerait à l’Union européenne et des pouvoirs étendus seraient octroyés à un « Représentant civil international », faisant également office de « Représentant spécial de l’UE » qui, sur le modèle du « Haut représentant » contrôlant la Bosnie-Herzégovine depuis près de douze ans, aurait le droit d’annuler toute décision des autorités du Kosovo et de démettre tout responsable, élu ou non. En Bosnie, les plus hauts responsables serbes et croates ont été victimes des pouvoirs exorbitants de cette sorte de vice-roi balkanique, essentiellement parce qu’ils étaient accusés de freiner les réformes centralisatrices exigées par la « communauté internationale ». Sur le plan militaire, le Kosovo continuerait à être occupé par une force de l’OTAN, comptant actuellement 17.000 hommes et dont aucune réduction du niveau n’est prévue dans un avenir proche. Quant à l’indépendance économique, elle relève de la grande illusion : les industries sont toujours à l’arrêt, les services publics ont été démantelés ou souffrent de graves carences par manque de personnel qualifié, le taux de chômage se situe entre 50 et 70 % et serait encore plus élevé sans les nombreux postes et subsides dépendant de l’ONU et de la multitude d’organisations internationales qui s’activent à « construire un Etat », une grande partie du PIB provient du secteur « informel », y compris la grande criminalité et la contrebande dont les profits ont explosé depuis 1999. En outre, la privatisation des entreprises publiques, menée à la va-vite, a été dénoncée par Belgrade, car ce sont les biens de l’Etat serbe qui ont été vendus ou bradés au bénéfice du privé.
Comme pour les autres fragments du puzzle ex-yougoslave, Bosnie et Macédoine en tête, l’indépendance du Kosovo n’aurait que peu en commun avec une pleine souveraineté. Cependant, un pas supplémentaire serait franchi : cette fois-ci, ce n’est plus une entité fédérale qui se séparerait, comme l’a encore fait en mai dernier le Monténégro, permettant paradoxalement à la Serbie d’accéder à une indépendance non demandée. Avec la province du Kosovo, c’est une partie intégrante de la Serbie qui ferait sécession, créant incontestablement un précédent. Les conséquences d’une telle décision sont encore difficiles à mesurer, mais les Serbes de Bosnie, dotés de leur propre entité, ont déjà annoncé qu’ils organiseraient un référendum d’indépendance. Côté albanais, cela encouragerait les mouvements centrifuges en Macédoine (où les relations avec la majorité slave restent tendues), voire au Monténégro ou en Grèce. L’objectif d’une « Grande Albanie » (ou d’un « Grand Kosovo ») est loin d’avoir été abandonné par les milieux nationalistes qui considèrent l’indépendance du Kosovo comme une première étape.
Une épidémie sécessionniste ?
Ce n’est pas un hasard si, au sein de l’UE, les Etats les plus « compréhensifs » envers la position serbe sont, outre le traditionnel allié grec, la Roumanie, l’Espagne et Chypre, des pays confrontés aux revendications autonomistes de leurs minorités. Mais c’est assurément sur le sol de l’ex-URSS que le précédent kosovar aurait des conséquences les plus immédiates. Depuis plusieurs mois, Moscou argue que la reconnaissance de l’indépendance du Kosovo pourrait être logiquement suivie de celle d’autres régions connaissant des situations similaires, bien que moins médiatisées, notamment l’Abkhazie et l’Ossétie du Sud (deux « républiques autonomes » de Géorgie en rébellion depuis plus d’une décennie), la Transnistrie (faisant partie de la Moldavie) et le Nagorny Karabakh (enclave arménienne en Azerbaïdjan). Quant à la Chine, qui devrait s’aligner sur la position russe au Conseil de sécurité, elle s’inquiète que l’exemple soit retenu par Taiwan, ses indépendantistes tibétains, voire ouïgours. Et la liste des candidats qui, en Asie ou en Afrique, se sentiraient encouragés par l’accession à l’indépendance du Kosovo pourrait presque indéfiniment être allongée, d’autant plus que les Etats-Unis, en Irak par exemple, encouragent le dépeçage d’Etats jugés trop grands à leur goût.
Reste qu’un tel scénario pourrait buter sur un veto russe au Conseil de sécurité, ou une menace de veto qui ajournerait indéfiniment la résolution consacrant l’indépendance. Le nouveau mandat de l’UE au Kosovo serait remis en question, alors que la mission de l’ONU est pratiquement en train de boucler ses valises. Dans l’état actuel des relations entre Moscou et Washington – le pire depuis vingt ans – et avec la multiplication des déclarations de la diplomatie russe rejetant toute solution n’ayant pas l’aval des deux parties, une telle éventualité ne peut être écartée.
On en viendrait alors au « plan B », avec déclaration unilatérale d’indépendance par Pristina, indépendance qui serait immédiatement reconnue par les Etats-Unis et certains de leurs alliés européens. L’UE se retrouverait profondément divisée et renoncerait à gouverner la province. De nouvelles violences viseraient le personnel et les installations de l’ONU et les enclaves des minorités, forçant la KFOR à intervenir contre les foules albanaises, ou à se retirer… Ce « plan B » a déjà été évoqué par divers diplomates états-uniens, dont récemment par Richard Holbrooke, le « peacemaker » bosniaque, qui n’hésite pas à prédire une nouvelle guerre dans les Balkans, dont il rejette bien entendu la responsabilité sur la Serbie et, surtout, la Russie.
Une autre approche serait de mettre en cause les promesses d’indépendance faites par les responsables occidentaux aux leaders albano-kosovars, au moins depuis les pourparlers de Rambouillet, qui servirent de prétexte aux bombardements de 1999. Belgrade et Moscou ne font que suivre la logique du droit international, garantissant l’intégrité des Etats. Les Etats-Unis restent, eux et plusieurs de leurs alliés dans l’OTAN, fidèles à une logique d’interventionnisme dans les affaires balkaniques, n’ayant mené qu’à l’exacerbation des conflits causés par l’effondrement de la Yougoslavie socialiste. Et dont la longue liste n’est peut-être pas close…
Georges Berghezan
Journaliste, contributeur de l'Atlas alternatif
[1] Le Groupe de contact réunit les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, la France, l’Allemagne, l’Italie et la Russie à propos de certains dossiers concernant l’ex-Yougoslavie.
[2] Rappelons que c’est le même Martti Ahtisaari qui fut alors chargé de transmettre au président Milosevic les conditions mises par l’OTAN pour l’arrêt de ses frappes.
Cet article a été publié dans Alerte OTAN ! n° 25 (mars 2007), du Comité de surveillance OTAN (CSO, Bruxelles, www.csotan.org/ )
Une centaine de parachutistes des forces françaises basés au Gabon est arrivée dimanche dernier à Bangui, en renfort des 200 soldats stationnés dans la capitale de Centrafrique. Le même jour des affrontements ont eu lieu entre l'armée française et les rebelles de l'Union des forces démocratiques pour le changement, à Birao, une ville stratégique située nord-est du pays (http://www.congoplus.info/article_congoplus-2654.html). L'action militaire de la France au soutien du gouvernement centrafricain se poursuit depuis quelques mois déjà (http://www.congoplus.info/tout_larticle.php?id_article=1651).
L'affaire n'est pas totalement séparée de celle du Darfour à propos de laquelle l'inénarrable procureure de la Cour pénale internationale, ex procureure du TPIY, Louise Harbour déploie en ce moment son activisme (http://fr.news.yahoo.com/08032007/5/darfour-les-viols-continuent-selon-l-onu.html).
C'est ainsi toute la zone sahélienne entre la Libye et Bangui qui est plongée dans l'instabilité par différentes luttes de factions et qui pourrait échapper progressivement au contrôle de Paris tandis que les Etats-Unis y poursuivent leur implantation (cf un article d'analyse à ce sujet sur http://paris.indymedia.org/article.php3?id_article=74763).