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29 janvier 2008 2 29 /01 /janvier /2008 16:36
Copie-de-gas-20pipeline-copie-1.jpg L'intransigeance des Occidentaux sur la question du Kosovo a déjà fait une victime collatérale : la politique énergétique des Etats-Unis en Europe.

Le président serbe Boris Tadic et le premier ministre Vojislav Kostunica ont signé vendredi dernier à Moscou un accord pour trente ans qui vend à la compagnie russe Gazprom 51 % des parts de la compagnie gazière d'Etat serbe NIS, et ce au prix qu'avaient demandé les Russes. Dans le cadre de cet accord, un gazoduc de 10 milliards de mètres cubes sera construit à travers la Serbie, et Gazprom contrôlera 78 % du marché de détail des carburants dérivés du pétrole dans ce pays, 12 % allant à un autre géant russe, Loukoil . Pour compléter le dispositif, Gazprom a signé avec la compagnie autrichienne OMV un accord prévoyant le transfert au monopole russe du gaz de 50% de Central Europe Gas Hub (CEGH), filiale d'OMV Gas International, et dont le siège se trouve dans la ville autrichienne de Baumgarten. Il ne manque plus à Gazprom qu'un accord avec la Hongrie, pour espérer pouvoir mettre en service son dispositif de gazoduc South Stream. Budapest va donc pouvoir faire monter les enchères. Si la Hongrie ne parvient pas à s'entendre avec Moscou, Gazprom peut utiliser un itinéraire alternatif passant de la Bulgarie en Grèce puis, par la Méditerranée, en Italie. Mais, dans ce cas, le projet de gazoduc en Serbie sera dans l'impasse (http://www.kommersant.com/p846202/r_500/natural_gas_pipelines/).

Les autorités américaines ont manifesté une inquiétude particulière au sujet du développement de la coopération énergétique entre la Russie et la Serbie et rappelé à l'Union européenne leur préférence pour le projet de gazoduc de Nabucco, destiné à acheminer du gaz en Autriche via la Bulgarie, la Roumanie et la Hongrie. Peut-être pour apaiser l'interventionnisme états-unien, les autorités iraniennes la semaine dernière ont annoncé être prêtes à accorder des ressources pour Nabucco... (http://fr.rian.ru/business/20080128/97862287.html).

Face à cela l'offre de l'Union européenne à l'égard de la Serbie (qui pourtant depuis un siècle regarde davantage vers l'Ouest que vers la Russie) reste timide. Alors que l'Autriche avait convaincu en 2006 l'Union de ne plus exiger de la Croatie la coopération avec le TPIY pour intégrer l'Empire européen, les Pays-Bas, dans un bel élan anti-fédéraliste, ont maintenu, contre les autres Etats de l'Union, un veto sur la signature d'un accord de stabilisation et d'association tant que le général Ratko Mladic n'était pas livré à ce tribunal (source : RFI). Ce veto néerlandais fait l'affaire du nationaliste Tomislav Nikolic, vainqueur du premier tour de l'élection présidentielle serbe, qui dit ne rien attendre de l'Union européenne tant que celle-ci veut arracher le Kosovo à la Serbie et affirme même regretter que la Serbie "ne soit pas une province de la Russie" (http://www.dw-world.de/popups/popup_printcontent/0,,3087792,00.html). (NB : En dépit de ces appels du pied de M. Nikolic, V. Poutine continue toutefois de soutenir Boris Tadic.)

Les Européens, présidés en ce moment par les Slovènes, ont malgré tout proposé un accord réduit aux Serbes (sur les visas, le dialogue politique), leur promettant même à demi-mots une entrée à terme dans l'Union, pourvu qu'ils ne votent pas pour M. Nikolic. La question pèsera lourd sur l'issue du second tour du scrutin, y compris sur les conditions du soutien du premier ministre Kostunica à son frère ennemi Tadic.

Du côté états-unien, les menaces contre la Serbie et la Russie ne sont pas l'apanage des néo-conservateurs. Dans un article publié dans le Guardian du 28 janvier 2008, Morton Abramowitz suggère que l'OTAN augmente sa présence militaire au Kosovo pour empêcher les Serbes de cette province de faire sécession en cas de déclaration unilatérale d'indépendance de la part des représentants albanais, et exorte à s'opposer aux positions de Moscou si la Russie dans la foulée reconnaît l'indépendance de l'Abkhazie (hypothèse pourtant exclue par la Russie http://fr.rian.ru/world/20080129/97954887.html). Morton Abramowitz, fondateur de l’International crisis group et surtout éminence grise de l’administration Clinton pendant la guerre du Kosovo auprès de l’UÇK, soutient en ce moment Barak Obama à l'élection présidentielle. Richard Holbrooke, lui, qui fut l'artisan de la politique clintonienne pro-UÇK à Rambouillet en 1999, et qui conseille maintenant Hillary Clinton, expliquait dans Le Monde du 25 janvier : "Notre défi,
c'est assurer un leadership (des Etats-Unis), mais sans hégémonie" (
http://www.lemonde.fr/elections-americaines/article/2008/01/25/richard-holdbrooke-l-administration-bush-ne-pourra-pas-attaquer-l-iran_1003828_829254.html#ens_id=904503). La nuance sémantique n'est pas énorme... Les électeurs états-uniens n'ont guère le choix qu'entre les auteurs des bombardements contre la Serbie, et les promoteurs de la guerre d'Irak. undefined

La situation actuelle dans les Balkans ne cesse cependant de provoquer des inquiétudes qui s'expriment dans des forums peu médiatisés. Ainsi par exemple l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe le 22 janvier dernier a-t-elle très sérieusement contesté un projet de résolution élaboré par le représentant britannique Lord Russell-Johnston jugé trop favorable au point de vue occidental. A l'occasion des débats de cette assemblée, la représentante du PC tchèque Katerina Konecna a comparé l'enlèvement du Kosovo à la Serbie au démantèlement de la Tchécoslovaquie par les accords de Munich. La délégation d'Azerbaïdjan à cette occasion a dénoncé le risque que la sécession du Kosovo ait des effets désastreux sur un autre conflit "gelé" de l'ère post-soviétique, celui du Nagorny-Karabakh (http://www.kommersant.com/p844517/r_527/PACE_Kosovo_EU/ ).

A l'heure où la marine russe reprend ses patrouilles dans l'Atlantique et en Méditerrannée pour la première fois depuis 1992 (http://fr.rian.ru/defense/20080129/97934362.html), l 'Europe et son allié états-unien avancent chaque jour davantage dans une logique de guerre froide, qui pourrait, en de nombreux points, dégénérer en conflits ouverts.

FD
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